130 000 moutons coincés dans des navires pendant une semaine lors du blocage rocambolesque du Canal de Suez ! Les millions d’animaux entassés, chaque année, dans des cargos ou des camions surchargés, subissent une souffrance intolérable. Pour y mettre fin, la Fondation 30 Millions d’Amis demande une nouvelle fois au ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation et à l’Union européenne d’interdire les transports d’animaux vivants hors UE.
Il aura fallu un embouteillage maritime monstrueux long d’une semaine (du 23 au 29 mars 2021) sur le Canal de Suez pour rappeler le sort cruel des transports d’animaux vivants. Si le problème du navire empêtré est depuis réglé, celui des animaux entassés comme des marchandises ne l’est toujours pas. Cette scène lamentable aura au moins eu le mérite de mettre la lumière sur une absurdité : celle de passages récurrents d’immenses navires dans l’étroit Canal de Suez. Au total, plus de deux millions et demie de bovins, ovins et caprins sont transportés chaque année par la mer, depuis l’UE vers des pays tiers, dans des conditions barbares !
Des tragédies toujours plus nombreuses
– L’Ever Given, un porte-conteneurs de plus de 220 000 tonnes et de 400 mètres de long, était coincé pendant une semaine dans le sud du canal, à quelques kilomètres de la ville de Suez, et a bloqué cette voie stratégique qui voit passer environ 10 % du commerce maritime international. « La situation est critique et risque de devenir une tragédie maritime sans précédent impliquant des animaux vivants, avait prévenu Gabriel Paun, représentant de l’ONG Animals International. Si les animaux manquent d’eau et de nourriture, ils commenceront à se pousser les uns les autres et périront tous ». Et pour cause, 130.000 animaux se trouvaient dans les onze cargos partis de Roumanie. Un cas malheureusement loin d’être isolé, tant les accidents (naufrages, blocages…) sont légion et les issues, souvent fatales. En cause : la surcharge des cargos, l’ancienneté de la flotte et l’utilisation de navires conçus pour d’autres fins que celle du transport d’animaux.
– Début mars 2021, ce ne sont pas moins de 864 veaux qui ont été abattus au port de Carthagène (Espagne) sur ordre des autorités espagnoles, après plus de deux mois d’errance en mer, à la suite d’un blocage administratif aux portes de la Turquie. L’abattage de 1610 bovins à bord d’un second navire a également été ordonné (Reuters, 22/03/2021).
– Six mois plus tôt, plus de 6000 bovins – ainsi que 40 membres d’équipage – périssaient après le naufrage du Gulf Livestock 1, en route depuis la Nouvelle-Zélande vers la Chine (09/2020).
– En novembre 2019, le chavirage du Queen Hind avait causé une catastrophe sans précédent avec la mort de plus de 14.000 moutons transportés de Roumanie vers l’Arabie saoudite.
Un supplice à chaque étape du trajet… malgré la réglementation européenne
Transports en forte canicule, absence de contrôle vétérinaire au chargement, cargos surchargés, maltraitances… Ces dérives nombreuses sont pourtant contraires au droit de l’Union européenne dont le règlement du 22 décembre 2004 encadre – théoriquement – la protection des animaux pendant le transport. Un constat accablant observé par la Commission européenne dans son rapport d’audit de 2019 sur le transport maritime des animaux et publié en mai 2020 par la Direction générale de la santé.
Des milliers d’animaux sont privés de soins durant des jours, voire des semaines.
Maria Boada – Animal Welfare Foundation
En témoignent les images cauchemardesques révélées en 2018 par Animals International. A bord d’un cargo koweïtien, des milliers de moutons sont à l’agonie, alors que la température est supérieure à 50 degrés. « Ils sont littéralement en train de cuire vivants », fustigeait Gabriel Paun. « Dans les ports européens comme dans les pays tiers, l’absence de contrôles, d’infrastructures et de sanctions est désastreuse pour les animaux, précise Maria Boada, chef de projet chez Animal Welfare Foundation. Des milliers d’animaux sont ainsi privés de soins durant des jours, voire des semaines. » « En moyenne, je suis inspecté une fois sur dix seulement, ajoute le transporteur Romain Bardy (Envoyé Spécial, 3/09/2020). En cause ? Le manque de vétérinaires ».
Les actes de maltraitance, quant à eux, sont monnaie courante puisque certains dockers n’hésitent pas, en toute illégalité, à frapper les animaux pour accélérer le mouvement. Dans le port de Sète, où près de 150 000 animaux transitent chaque année, les bovidés sont – d’après les images tournées par Animals International – sommés d’avancer à coups de bâton. Et le calvaire continue à l’arrivée ! Dans le cadre d’une enquête menée, en décembre 2020, au sud de la Méditerranée, des ONG telles que Welfarm – partenaire de la Fondation 30 Millions d’Amis – ont filmé le sort infligé aux animaux dans un marché aux bestiaux près de Rabat (Maroc). On y aperçoit des bovins ficelés par les pattes… la tête recouverte d’une bâche en plastique. Terrifiés, les animaux y sont poignardés et égorgés, conscients… Or, chaque année, la France exporte un millier de bovins vers ce pays !
La Fondation 30 Millions d’Amis demande la fin de l’exportation d’animaux vivants hors UE
La Fondation 30 Millions d’Amis – qui a maintes fois interpellé les ministres de l’Agriculture successifs pour suspendre le transport des animaux vivants en période de canicule – milite pour une limitation des transports d’animaux vivants à 8 heures par jour et pour l’arrêt des exportations hors Union européenne. « Il faut surtout imposer l’abattage des animaux là où ils ont été élevés et transporter les carcasses en containers réfrigérés, que ce soit en bateau ou en camion, en France ou à l’étranger, ajoute Reha Hutin, Présidente de la Fondation 30 Millions d’Amis. Cela fait des dizaines d’années que nous le demandons ! »
L’appât du gain provoque toujours des souffrances. Il faut que cela cesse !
Reha Hutin
Un vœu largement partagé par l’opinion publique. Pour preuve, la pétition de la Fondation 30 Millions d’Amis pour réclamer l’arrêt des transports d’animaux de boucherie en temps de canicule a recueilli près de 85 000 signatures, alors que 81 % des Français se déclarent favorables à ce que les animaux d’élevage soient abattus sur le lieu de leur élevage par des professionnels, pour éviter les souffrances liées au transport des animaux et les scandales de maltraitance dans les abattoirs (Baromètre Fondation 30 Millions d’Amis / Ifop, 2021). « Mais le gouvernement ne cesse d’ignorer la demande d’une majorité de citoyens, soucieuse du sort réservé à ces êtres sensibles, déplore Reha Hutin. Malheureusement, l’appât du gain provoque toujours des souffrances. Il faut que cela cesse ! Puisque ces animaux nous nourrissent, mettons au moins le prix pour ne pas leur imposer ces atroces souffrances ».
Après la situation de crise du Canal de Suez, le député Loïc Dombreval (LaRem) a adressé au ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation Julien Denormandie des propositions visant à mettre fin à ces périples infernaux. « Il nous faut impérativement tirer les leçons de cette crise qui nous renvoie à une problématique connue et sur laquelle l’Union européenne doit évoluer : la réglementation du transport maritime d’animaux vivants, assure le député. Le bien-être animal doit devenir une condition sine qua non ». Une initiative soutenue par la Fondation 30 Millions d’Amis.
D’autres pays déjà engagés dans cette voie
A l’échelle de l’Union européenne, une commission d’enquête sur le transport d’animaux d’élevage avait été lancée dès juin 2020, dans l’objectif d’améliorer la protection des animaux de ferme. « C’est un premier pas important qui va nous donner les moyens de nous pencher sur les raisons de ces souffrances endurées par les animaux », s’était félicitée l’eurodéputée (Verts/ALE) Caroline Roose.
S’inscrivant dans cette lignée, la Grande-Bretagne se prépare à interdire l’exportation d’animaux vivants (à l’exclusion des volailles) vers des pays tiers. Si une interdiction stricte de l’exportation d’animaux vivants était prononcée, la Grande-Bretagne deviendrait le premier pays en Europe à adopter cette mesure, même si d’autres pays européens ont également pris position en ce sens, fin 2020. L’Allemagne a refusé d’approuver le départ de 132 génisses reproductrices à destination du Maroc, au motif que le transport prévu risquait de nuire au bien-être des animaux, et que l’abattage dans le pays d’arrivée n’était pas effectué dans des conditions satisfaisantes ; tandis que les Pays-Bas se sont opposés à l’importation de veaux depuis l’Irlande, le Danemark, la République Tchèque et les pays baltes.
Face à cette souffrance intolérable qui perdure et qui devrait être évitée, la Fondation 30 Millions d’Amis lance une pétition pour demander au ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation et à l’Union européenne l’interdiction des transports d’animaux vivants hors UE et imposer le transport de viande en conteneurs réfrigérés. Sa pétition est également en ligne sur le site de l’Assemblée Nationale.
Signez notre pétition pour la fin des transports d’animaux vivants hors UE
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