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DécryptagesAvec la réception des premiers vaccins achetés, le pays doit faire face au défi de la conservation et de l’acheminement dans les régions.
Puisant dans une petite glacière bleue, Khady Sarr extrait, une à une, les doses de vaccin Sinopharm qu’elle s’apprête à injecter à ses patients. Le geste est le même que pour les vaccins de routine. « Les glacières permettent de ne pas ouvrir trop souvent le réfrigérateur installé un peu plus loin et d’assurer le maintien de la chaîne du froid », précise l’infirmière du centre de santé Gaspard-Kamara de Dakar. Des équipements indispensables à la campagne de vaccination qui a débuté le 23 février au Sénégal sur fond de troubles sociaux.
Pour la mener à bien, Dakar a acheté 200 000 doses à la Chine et en a reçu 324 000 autres de la part d’AstraZeneca grâce au mécanisme de solidarité internationale Covax. Près d’un million de vaccins supplémentaires devrait arriver dans les prochains mois. Des produits qu’il faudra à tout prix préserver de la chaleur et de la congélation jusqu’à ce qu’ils puissent être transportés vers les différents services de vaccination dans les centres urbains et les zones les plus reculées du pays.
Responsable de l’acheminement et de la distribution des vaccins dans les quatorze régions du pays, la Pharmacie nationale d’approvisionnement (PNA) dispose de deux grands camions frigorifiques. « Ce sont des chambres froides roulantes qui permettent de garantir la chaîne du froid durant tout le trajet, explique Sokhna Gaye, la pharmacienne à la tête de la gestion des stocks. Nous faisons un suivi des températures, et des accumulateurs et glacières sont prévus en cas de panne. »
Afin de stocker les doses, le pays a également investi dans 1 117 réfrigérateurs homologués par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour la conservation des vaccins contre le Covid-19 entre 2 et 8 degrés. Du matériel dont le coût est estimé à plus de 3 milliards de francs CFA (quelque 4,5 millions d’euros) et qu’il a fallu acheminer en amont vers les postes de santé et les dépôts locaux.
Comment ces machines peuvent-elles fonctionner correctement dans des régions où l’électricité est absente ou instable ? Ousseynou Badiane, coordonnateur du programme de vaccinations du Sénégal se veut rassurant. « En plus du matériel acheté récemment, nous avons environ 400 réfrigérateurs solaires répartis dans les localités où il y a moins de huit heures d’électricité par jour », affirme-t-il.
Toutefois, la question reste sensible. Le taux d’électrification rurale du pays est passé de 24 % en 2012 à 42,3 % en 2019, selon le ministère de l’énergie. Un vaccin mal conservé devient inefficace et n’a plus d’effet. « C’est sans danger pour le patient. Seulement, les vaccins anti-Covid-19, qui ne sont pas équipés de pastille de contrôle, doivent être jetés au bout de six heures si la chaîne du froid n’est pas respectée », explique Ousseynou Badiane.
Une chaîne logistique déjà éprouvée
Au Centre hospitalier universitaire de Fann à Dakar, six chambres froides de 40 m3 aux lourdes portes ont été installées en février 2021, notamment pour conserver les vaccins AstraZeneca. Derrière, des congélateurs peuvent descendre à des températures négatives, jusqu’à – 20 degrés, assure M. Badiane.
« Il n’y a que le Pfizer qui nous pose problème, car nous n’avons pas d’équipement qui va à – 80 degrés. Il faudra investir si nous prévoyons de le recevoir », anticipe-t-il, assurant que le Sénégal a déjà la chaîne logistique nécessaire pour prendre en charge tous les autres vaccins contre le Covid-19, dont celui du laboratoire Moderna. « Nous sommes habitués aux larges campagnes de vaccination où doivent être gérées de grandes quantités de doses », observe le coordonnateur du programme de vaccinations du Sénégal.
A partir du centre Gaspard-Kamara, quatorze agents de santé ont été déployés dans les cliniques privées et cabinets médicaux des environs pour administrer les 4 900 premiers vaccins chinois destinés au personnel médical. Un travail facilité par le grand réfrigérateur bleu supplémentaire installé dans le local de stockage du centre.
« Nous avions déjà deux frigos, mais ils ne pouvaient pas contenir l’ensemble de nos vaccins de routine, en plus de ceux contre le Covid-19 », souligne Pape Ndiaye, responsable du dépôt. Pour éviter les décrochages, des appareils enregistrent et contrôlent les données en continu jour et nuit. Un système censé donner l’alerte en cas de dérèglement. Selon les autorités, près de 160 000 personnes ont été vaccinées au Sénégal depuis février.
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