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Publié le : 18/03/2021 – 17:57
Riol Chemie, ChimConnect et Pharmcontract : ces trois entreprises allemandes sont, depuis début mars, sur la liste des entités sanctionnées par les États-Unis après l’affaire de l’empoisonnement de l’opposant russe Alexeï Navalny. Mais personne ne sait vraiment pourquoi et, pour l’une d’entre elles, si la société existe encore.
Pour Joe Biden, Vladimir Poutine peut être qualifié de « tueur » et le dirigeant russe devra « payer pour ses actes ». Si le nom d’Alexeï Navalny n’a pas été prononcé, le président américain devait avoir en tête le sort du célèbre opposant russe, actuellement emprisonné à une centaine de kilomètres de Moscou, en faisant sa déclaration diplomatiquement incendiaire, mercredi 17 mars. L’administration américaine pense que le Kremlin a joué un rôle dans la tentative d’empoisonnement dont Alexeï Navalny a été victime en août 2020.
Pour ce qui est du « prix à payer », Washington a déjà commencé à présenter l’addition à Moscou avec une liste de personnes et d’entités visées par des sanctions économiques depuis le 3 mars. La plupart des individus et entreprises sanctionnés sont russes, à l’exception de trois… Et c’est ce qui chiffonne actuellement l’Allemagne.
Dirigeants d’origine russe ou ukrainienne
« Le grand public ne le sait pas mais les États-Unis ont sanctionné trois sociétés allemandes pour leur soutien au programme de développement des armes chimiques russes », souligne la Frankfurter Allgemeine Zeitung, dans une enquête publiée mercredi. Washington a en effet préféré ne pas diffuser officiellement le nom des treize entités dans son viseur, ce qui rend leur identification difficile pour l’observateur non averti. Mais la liste a récemment fuité.
On y trouve Riol Chemie, ChimConnect GmbH et Pharmcontract, trois groupes domiciliés sur le sol allemand dont l’activité réelle est entourée d’un épais voile de mystère, malgré les efforts déployés ces dernières semaines par les médias allemands pour le percer.
Officiellement, elles travaillent toutes dans les secteurs de la chimie et du matériel de laboratoire. Leurs sites, quand ils existent, sont particulièrement avares en détail et il faut s’en référer aux différents registres commerciaux en ligne pour en apprendre un peu plus. C’est ainsi que Riol Chemie, dont le siège est dans la petite ville de Lilienthal, à proximité de Brême, se targue de proposer une gamme de 40 000 produits, comme des réactifs et des agents chimiques, fabriqués « en Russie et dans des pays comme la Chine, l’Inde et le Japon ». ChimConnect, qui se trouve à Constance, vendrait des produits chimiques et du matériel de laboratoire. Cette société produirait en outre des « substances organiques et inorganiques » ainsi que des « solvants » dans des sites situés en Russie et au Kazakhstan, a appris la Deutsche Welle.
Les deux entités, détenues par des dirigeants d’origine russe ou ukrainienne, sont aussi liées entre elles par l’intermédiaire de Maria Ivankina. Cette Russe de Saint-Pétersbourg dirige en effet ChimConnect GmbH tout en étant l’une des responsables de Riol Chemie depuis 2007, si l’on en croit son profil LinkedIn.
Mais difficile d’en savoir plus. Les numéros de téléphone pour ces deux entités sonnent dans le vide ou ne sont pas attribués, a pu constater France 24. Seule la Deutsche Welle a réussi à joindre quelqu’un à Riol Chemie qui lui a expliqué, en russe, qu’il s’agissait d’un simple entrepôt.
L’entreprise fantôme
Ce puzzle se complique encore lorsqu’on y ajoute la pièce Pharmcontract, la troisième entreprise allemande sanctionnée par les Américains. Washington semble en effet avoir mis sur sa liste noire une société qui n’existe plus.
Pharmcontract, enregistrée en 2013 à Francfort, a été rayée du registre du commerce allemand à l’été 2020 pour « absence de propriétaire ». La seule trace actuelle de cette entreprise mène à Kalouga, en Russie centrale, où se trouve Pharmcontract Group, qui pourrait être la maison mère de la filiale allemande disparue, suggère la Frankfurter Allgemeine Zeitung. La société se présente comme un regroupement d’entreprises composant la « première holding russe de produits chimiques et pharmaceutiques ».
Sauf que cette dernière n’existe plus vraiment non plus. Elle a fait faillite en octobre 2018 et a été mise sous tutelle en février 2019, assure Vademecum, un magazine russe spécialisé dans l’industrie de la santé.
C’est donc un étrange attelage d’entreprises à l’existence plus ou moins établie qui se retrouve sur la liste des sanctions américaines. Avec, d’après la Frankfurter Allgemeine Zeitung, cette question en pointillé : à quel point l’Allemagne a-t-elle contribué sans le savoir à la fabrication de produits qui ont pu servir à la mise au point d’armes chimiques par la Russie ?
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