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Birmanie : la junte tente de briser le mouvement de désobéissance civile

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La journée de mercredi a été marquée par de nouvelles violences et de manifestations. Les forces de sécurité ont notamment mené un raid contre des cheminots grévistes. Depuis le coup d’État du 1er février, de nombreux fonctionnaires ont cessé le travail.

Les militaires veulent faire plier les grévistes : les forces de sécurité birmanes ont lancé un raid, mercredi 10 mars, à Rangoun, contre des cheminots qui participent au vaste mouvement de désobéissance civile contre la junte.

Plusieurs centaines de policiers et de soldats se sont déployés autour de l’enceinte où réside le personnel ferroviaire de la gare Ma Hlwa Gone, dans l’est de la capitale économique.

« Ils bloquent les portes (des appartements) et les détruisent pour entrer », a relaté à l’AFP une membre de la famille d’un cheminot, sous couvert d’anonymat par peur des représailles. « J’ai réussi à m’échapper, mais je m’inquiète pour les travailleurs » et leurs proches encore coincés.



Selon elle, quelque 800 employés des chemins de fer dans cette gare sont impliqués dans le mouvement de désobéissance civile.

Médecins, enseignants, employés des compagnies d’électricité, cheminots, de nombreux fonctionnaires ont cessé le travail depuis le coup d’État du 1er février qui a renversé le gouvernement civil d’Aung San Suu Kyi.

Ce mouvement perturbe la fragile économie birmane avec des bureaux ministériels vides, des écoles et des hôpitaux fermés, des banques dans l’incapacité de fonctionner.



Forte présence militaire

Les principaux syndicats ont appelé à « l’arrêt complet de l’économie » pour tenter de paralyser le pays et d’augmenter la pression sur les militaires.

La junte a ordonné de son côté aux fonctionnaires de reprendre le travail à partir du 8 mars, faute de quoi ils seraient licenciés et s’exposeraient à des représailles.

La Birmanie est en ébullition depuis le putsch, avec des manifestations quotidiennes à travers tout le pays.

Quelques rassemblements éparses ont été organisés mercredi. À Myingyan (centre), la manifestation a été dispersée violemment : trois manifestants pro-démocratie ont été blessés, dont un grièvement à l’œil, selon les secouristes.

Mais la forte présence militaire, notamment dans le quartier de Sanchaung à Rangoun – théâtre dimanche d’une spectaculaire opération des forces de sécurité avec des centaines de contestataires encerclés -, restait dissuasive et les foules étaient moins nombreuses.

La nuit dernière, sept protestataires ont été arrêtés dans le quartier, d’après les médias d’État.

Dans une autre partie de la ville, les forces de sécurité ont brûlé des barricades de fortune, menaçant des résidents de mettre le feu à leur appartement, a relaté à l’AFP une habitante de 26 ans.

Raids contre des habitations, des hôpitaux, des universités, arrestations en masse, recours à la force létale : la junte semble plus déterminée que jamais à vouloir éteindre le vent de fronde largement pacifique qui souffle sur le pays.

Au moins 60 civils ont été tués et près de 2 000 personnes arrêtées depuis le 1er février, d’après l’Association d’assistance aux prisonniers politiques.

L’armée assure ne pas être impliquée dans le décès des manifestants.

Elle justifie son passage en force en allégeant de vastes fraudes électorales lors des législatives de novembre remportées massivement par le parti d’Aung San Suu Kyi, la Ligue nationale pour la démocratie (LND).

« Haute trahison »

Dans un geste symbolique, plusieurs députés LND déchus ont annoncé sur Facebook avoir nommé un de leurs responsables, Mahn Win Khaing Than, vice-président du pays, en charge de remplacer l’ex-président de la République Win Myint et l’ancienne cheffe du gouvernement Aung San Suu Kyi, toujours tenus au secret.

Les députés qui ne reconnaissent pas la légitimité du coup d’État et ont créé un comité pour représenter le gouvernement civil se rendent coupables de « haute trahison », un crime passible de la peine de mort ou de 22 ans de détention, a averti il y a quelques jours la junte.

Deux responsables de la LND sont morts en détention ces derniers jours, très peu de temps après leur interpellation. De nombreux ont été arrêtés, dont trois la nuit dernière.

La junte cible aussi les médias indépendants : trois (Myanmar Now, Mizzima et Kamaryut Media) ont été visés par des raids des forces de sécurité.

Plusieurs organes de presse se sont vu retirer leur licence de publication et une vingtaine de journalistes sont en détention, dont un photographe de l’agence de presse américaine Associated Press.

Le passage en force des généraux, qui a mis fin à une décennie de transition démocratique, suscite un concert de protestations internationales.

Plusieurs diplomates birmans, dont les ambassadeurs à l’ONU et au Royaume-Uni, se sont même désolidarisés du régime.

L’ambassadeur de France en Birmanie, Christian Lechervy, s’est rendu, mercredi, devant la prison d’Insein à Rangoun, tristement célèbre sous les dictatures précédentes et où de nombreuses personnes sont détenues depuis le 1er février.     

« La France appelle à la libération immédiate, sûre et inconditionnelle de tous les prisonniers politiques emprisonnés », a-t-il déclaré sur Twitter.

Les États-Unis, la Grande-Bretagne, et d’autres pays occidentaux ont imposé des sanctions ciblées, mais les généraux font la sourde oreille.

La Chine et la Russie, alliées traditionnelles de l’armée birmane, ne condamnent pas officiellement le coup d’État.

Le Conseil de sécurité de l’ONU n’a donc pas réussi à se mettre d’accord la semaine dernière sur une déclaration commune. Des négociations sont en cours.

Avec AFP

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