Que doit-on faire si l’on a acquis du Bitcoin, de l’Ethereum, du Solana de manière occasionnelle ? Doit-on payer des impôts et sous quelle forme ? Comme nous allons le voir ici, l’obligation de déclaration est sans appel et l’arsenal de sanctions en cas d’oubli peut surprendre…
Si le secteur de la cryptomonnaie peut sembler jeune, les législateurs ont été rapides à s’intéresser aux enjeux fiscaux relatifs à ces nouvelles monnaies. Et ils n’ont pas tardé à décréter qu’il fallait déclarer les plus-values réalisées et à établir des niveaux de taxation.
En France, les choix opérés par l’Assemblée nationale peuvent surprendre à plus d’un titre. La fiscalité appliquée au secteur des cryptomonnaies est complexe, parfois nébuleuse et disons-le tout net, quelque peu anxiogène, car les sanctions prévues paraissent excessives. De plus, estimer ce qu’il faut déclarer au juste et comment le déclarer est parfois loin de couler de source. Fort heureusement, si vous entrez dans la catégorie des usagers « occasionnels », ce qui est probablement le cas, la procédure est relativement simple.
Le régime en vigueur en 2022 est issu d’une loi de finance du 28 décembre 2018. Les règles pour les particuliers ont été énoncées dans le Code général des impôts, à l’article 150 VH bis. Il ressort que tous les tokens que l’on peut détenir sont a priori concernés, pas seulement le Bitcoin.
Sachez-le cependant : la déclaration devra porter uniquement sur les plus-values réalisées entre l’achat et la vente d’un actif numérique. Nous allons y revenir plus en détail.
Le régime d’imposition
Le premier point à déterminer est celui du régime auquel on appartient.
Les plus-values réalisées de façon non régulière, non systématique, sont considérées comme une activité « occasionnelle ».
Les plus-values résultant d’une activité d’achat en vue d’une revente de cryptoactifs sont considérées comme une activité semi-professionnelle et soumises à ce titre au régime des BIC (bénéfices industriels et commerciaux).
Le fait de pratiquer un grand nombre d’opérations d’achat et revente de cryptomonnaies, analogues à des opérations de Bourse, et de réaliser des plus-values majeures va entraîner une qualification de « professionnel ». Cette activité subit un taux d’imposition particulièrement excessif en France, avec un taux pouvant aller jusqu’à plus de 65 % de la plus-value.
La jurisprudence du Conseil d’État du 26 avril 2018 a décrété que les revenus issus du minage étaient imposés comme des BNC (bénéfices non commerciaux) au taux de 17,2 %.
Le grand souci est qu’il n’existe pas de critère précis concernant ces divers niveaux d’activité et qu’une part peut donc relever de l’appréciation de l’administration fiscale.
Système actuel pour le « trader occasionnel »
Dans cet article, nous allons traiter avant tout du cas le plus répandu : celui de l’usager « occasionnel ». Est considéré comme tel toute personne qui a pu acheter de l’Ethereum, du Bitcoin, du Terra Luna, du Tezos, depuis une plateforme de trading comme Kraken, Binance, Coinbase, elToro… L’usager a donc acheté à partir d’une monnaie traditionnelle (dite « Fiat ») telle que l’euro ou le dollar.
L’usager occasionnel doit déclarer les plus-values réalisées dans deux cas de figure :
Il a reconverti tout ou partie de ses cryptoactifs en monnaie fiduciaire (ou Fiat). Par exemple, le trader occasionnel avait acheté 2 ETH en janvier 2019 à partir de sa carte bancaire puis a revendu 1 de ces ETH et récupéré l’équivalent en euros en novembre 2021, afin de bénéficier de la montée du cours de l’ETH. Il doit donc déclarer la plus-value correspondante.
Il a acheté un bien ou un service via un paiement en cryptomonnaies et a réalisé une plus-value au passage. À titre d’exemple, l’achat d’un lecteur Blu-Ray en ETH lui a permis de réaliser une belle économie car le cours de l’ETH avait fortement monté entretemps.
Nous avons là des montants plus faciles à énoncer qu’à calculer, direz-vous. De fait, certaines plateformes de trading proposent d’aider le contribuable en générant le reporting adéquat. C’est par exemple le cas de Coinbase.
30 % d’imposition sur les plus-values
Dans le régime en vigueur en 2022, les plus-values « occasionnelles » sont soumises aux prélèvements suivants :
un prélèvement de 12,8 % au titre de l’impôt sur le revenu ;
un prélèvement social de 17,2 %.
Soit un total de 30 % sur les plus-values. On désigne couramment ce taux comme la flat tax. Il est à noter – et à déplorer – que ce taux soit bien plus élevé que dans d’autres pays européens. Ainsi, l’Allemagne, la Belgique, la Suisse et le Portugal pratiquent – parfois sous certaines conditions telle qu’une durée de détention minimale – une taxation égale à 0 % sur ces mêmes plus-values ! Comment comprendre une telle disparité ? Par le fait que les pays précités ont à cœur d’attirer les investisseurs crypto. On peut déplorer qu’un même élan ne soit pas présent en France.
Une obligation de déclaration
Le « trader occasionnel » est tenu de déclarer tous les comptes qu’il peut détenir sur des exchanges (plateformes de trading) telles que Binance ou Coinbase. Le formulaire de déclaration pour les plus-values en cryptoactifs est le Cerfa 2086. Pour ce qui est de comptes ouverts à l’étranger, le formulaire est le 3916 bis. Il est à noter que le particulier doit conserver les justificatifs ad hoc afin de pouvoir les produire en cas de demande de l’administration fiscale.
Exonération
Aucun montant n’est à déclarer si le montant des cessions en cryptomonnaies n’a pas généré une plus-value supérieure ou égale à 305 euros.
Seulement voilà, il va falloir répertorier l’ensemble de ses actifs et calculer si le total des plus-values réalisées ici ou là excède ce montant de 305 euros tout en tenant compte de la variation des cours à divers moments. Autant dire que l’opération va parfois relever du casse-tête.
Quid des moins-values ? Peut-on les déduire des plus-values réalisées ? Oui, sur l’année écoulée. Cela étant dit, si l’ensemble des opérations se traduit par une moins-value globale, celle-ci n’aura aucun effet de réduction de l’impôt.
Bien évidemment, aucune déclaration de plus-value n’est nécessaire si l’on n’a pas effectué de conversion de cryptoactif en euro (ou autre monnaie Fiat). Donc, les transactions de crypto à crypto ne sont pas imposables en 2022. Et pareillement, si l’on n’a pas réalisé d’achat à partir d’un portefeuille crypto, il n’y a rien à déclarer.
Toutefois, même dans ce cas de figure, il faudra faire connaître au fisc les comptes détenus sur des exchanges ou sur des cold wallets (stockage d’une clé privée sur une feuille ou une clé USB) et ce, pour l’ensemble du foyer fiscal.
Une évolution vers le barème progressif
Une évolution est prévue à compter du 1er janvier 2023 (article 19 de la loi de finances 2022). Elle ouvre la possibilité de soumettre la plus-value au barème progressif de l’impôt sur le revenu. Ainsi, un contribuable célibataire ayant un revenu fiscal inférieur à 25.710 € aura intérêt à opter pour un tel système, car les plus-values réalisées seront alors imposées à un taux de 0 ou 11 % selon le volume de revenus (17,2 % en incluant les cotisations sociales).
Sanctions
Les sanctions appliquées en cas d’oubli ou d’erreur sont importantes. Jugeons-en plutôt :
l’absence de déclaration peut entraîner une amende de 750 € pour chaque compte ou transaction concernée (article 1736 du CGI) ;
si cette absence de déclaration concerne des plus-values de cession d’actif, une majoration de 80 % des montants non déclarés ou erronés peut être appliquée ;
une omission ou erreur dans une déclaration peut rendre le contribuable passible d’une amende de 125 €.
Il est à espérer que ces modalités seront à la fois simplifiées et adoucies au fil du temps.
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