Organisé les 5 et 6 mars, le vote anticipé pour l’élection présidentielle sud-coréenne du mercredi 9 mars a attiré près de 37 % des électeurs, dix points de plus que pour les législatives de 2020. De quoi suggérer une mobilisation, supérieure aux attentes, des votants les plus jeunes, réputés indécis et peu politisés, sans qu’il soit possible de dire lequel des deux favoris, Yoon Seok-youl du Parti du pouvoir populaire (PPP, opposition conservatrice) ou Lee Jae-myung du Parti démocrate (PD, majorité), en profitera pour succéder à Moon Jae-in, qui ne pouvait se représenter, la Constitution prévoyant un mandat unique à la présidence du pays.
Dans une campagne polluée par les scandales et les invectives, où de grands enjeux comme la Corée du Nord ont été relégués au second plan, la question des jeunes a occupé une place à part. « Pour la première fois, l’élection est une bataille entre générations, et non autour du régionalisme ou de l’idéologie, les lignes de fracture traditionnelles », explique Duyeon Kim, du think tank Center for a New American Security.
Au coude-à-coude dans les sondages, et alors que les intentions de vote des plus de 40 ans semblent figées, l’ancien procureur Yoon, comme l’avocat et ex-gouverneur de la province de Gyeonggi (autour de Séoul) Lee ont tout fait pour s’attirer les bonnes grâces de la « génération 2030 » (entre 20 et 39 ans) et séduire une jeunesse peu politisée voire désabusée. Cette dernière n’hésite pas à parler de son pays comme du « Hell Joseon », Joseon étant le nom de la Corée entre 1392 et 1897, ou se présente volontiers comme la « sampo saedae », la « génération des trois sans » : sans espoir de pouvoir se marier, d’avoir un enfant ou de posséder une maison. En Corée du Sud, il faut avoir de bons revenus, voire un logement, pour se marier.
« Jeunes individualistes »
Cette génération a déserté le camp démocrate qu’elle soutenait jusque-là, déçue par la politique de Moon Jae-in, qui n’a pas su enrayer l’explosion des prix de l’immobilier ou améliorer l’accès à l’emploi. Pour les jeunes, l’administration Moon est aussi coupable d’avoir taxé, en janvier, les transactions financières et de cryptomonnaies, dans lesquelles beaucoup ont placé leurs économies afin de se construire un avenir et caresser le rêve du K-FIRE, la version coréenne du « Financial Independence, Retire Early » (indépendance financière, retraite rapide). Selon un sondage d’avril 2021 de l’institut NH Investment & Securities, 65,9 % visent une retraite au plus tard à 51 ans, avec pour objectif d’avoir alors constitué un capital de 1,37 milliard de wons (1 million d’euros) en moyenne.
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