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La Mauritanie accuse l’armée malienne de crimes « récurrents » contre ses ressortissants

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Un soldat des Forces armées maliennes (FAMa) à Kati, près de Bamako, en janvier 2022. FLORENT VERGNES / AFP

La Mauritanie a haussé le ton contre son voisin malien mardi 8 mars, accusant son armée de crimes « récurrents » sur son sol contre des Mauritaniens. Le ministère mauritanien des affaires étrangères a indiqué avoir convoqué l’ambassadeur du Mali, Mohamed Dibassy, et lui avoir signifié sa « vive protestation contre les récents actes criminels récurrents » commis selon lui par l’armée malienne contre des Mauritaniens.

La Mauritanie a émis cette protestation après deux événements graves impliquant des Mauritaniens en l’espace de quelques semaines au Mali, dont la disparition de plusieurs ressortissants de l’autre côté de la frontière dans des circonstances encore obscures il y a quelques jours.

Des enregistrements sonores circulant sur les réseaux sociaux, attribués à des témoins oculaires mais non authentifiés, ont mis en cause l’armée malienne dans la disparition d’une trentaine de Mauritaniens du côté malien dans la zone frontalière au sud d’Adel Bagrou (est de la Mauritanie).

Un député local, Mohamed Mahmoud Ould Henenna, cité par l’agence privée Alakhbar, a parlé d’au moins quinze morts. Cette disparition a été précédée en janvier par la mort, elle aussi dans des circonstances non officiellement éclaircies, de sept Mauritaniens dans le même secteur. A l’époque déjà, la question d’une possible implication de soldats maliens avait été posée.

« Fermer la frontière » ?

Le ministère mauritanien rappelle dans un communiqué publié par l’agence de presse nationale que le gouvernement avait à cette occasion envoyé une délégation de haut niveau au Mali, « pour tenter de contenir ce comportement hostile envers nos concitoyens ». « Malgré les assurances données » par les autorités maliennes, leur réponse « est restée en deçà des attentes », déplore le ministère.

Un diplomate mauritanien s’exprimant sous le couvert de l’anonymat suivant la pratique courante dans une telle situation a mis en garde les autorités maliennes. « Nous avons clairement dit aux Maliens que, si ça continue, nous allons fermer la frontière, a-t-il précisé. En plus, les autorités à Bamako ne décrochent pas le téléphone quand nous les appelons. »

En janvier, le gouvernement malien avait annoncé l’ouverture d’une enquête et assuré qu’aucun élément ne mettait en cause l’armée malienne. Aucun élément de ces investigations n’a été rendu public depuis. La junte au pouvoir au Mali depuis août 2020 ne s’est toujours pas exprimée sur les récentes disparitions.

Le Mali est pris dans la tourmente depuis le déclenchement d’insurrections indépendantiste et djihadiste en 2012. En plus des agissements des groupes armés affiliés à Al-Qaida et à l’organisation Etat islamique, des violences intercommunautaires et des actes crapuleux, l’armée est régulièrement accusée d’exactions. Ces violences ont fait des milliers de morts, civils et militaires.

« Exactions à répétition »

La Mauritanie, avec laquelle le Mali partage plus de 2 000 kilomètres de frontière, a été touchée par l’expansion des groupes islamistes d’Algérie au début des années 2000, mais n’a plus connu d’attaque sur son sol depuis 2011.

Des dizaines de Mauritaniens ont manifesté mardi devant la présidence à Nouakchott pour réclamer la fin des exactions commises selon eux par l’armée malienne contre des compatriotes, a constaté un correspondant de l’AFP. « Nos frères sont froidement assassinés par l’armée malienne, nous devons réagir vite contre ces exactions à répétition », a déclaré l’un des participants, Ahmed Sidi, originaire de la même région que les disparus.

Nouakchott élève la voix alors que la junte malienne a entrepris récemment un effort de rapprochement avec la Mauritanie. Il s’agit pour les colonels de contrer l’embargo imposé en janvier par la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) pour sanctionner leur projet de se maintenir encore plusieurs années au pouvoir.

Les Etats membres de l’organisation intergouvernementale ont fermé leurs frontières avec le Mali, sauf la Guinée, elle-même dirigée par des militaires. La Mauritanie et l’Algérie, qui ne font pas partie de la Cedeao, ont gardé leurs frontières ouvertes.

Le ministère mauritanien explique dans son communiqué que les liens historiques et les considérations humanitaires l’ont empêché « d’affamer le peuple malien frère ». Mais il prévient « que la vie de nos innocents concitoyens et la sécurité de leurs biens resteront au-dessus de toute autre considération ».

Le Monde avec AFP

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