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À la frontière roumaine, un hôtel de luxe au service des déplacés ukrainiens

La salle des fêtes de l’hôtel Mandachi, près de la frontière roumano-ukrainienne, s’est transformée en centre d’hébergement d’urgence. Sous les dorures et les lustres, les déplacés ukrainiens se reposent quelques jours avant de reprendre leur route vers d’autres pays de l’Union européenne. Depuis son ouverture le 24 février, date de début de l’offensive russe en Ukraine, environ 1 500 personnes sont passées par cet hôtel de luxe.

Leslie Carretero, envoyée spéciale à Siret, Roumanie.

A l’écart du centre-ville de Suceava, à une quarantaine de kilomètres de la frontière roumano-ukrainienne, l’imposante façade de l’hôtel Mandachi est repérable de loin. Construit le long d’un boulevard, le bâtiment de cinq étages respire la modernité et le luxe. Érigé en 2020, le lieu qui arbore 4 étoiles dénote avec l’architecture soviétique des immeubles de la ville.

Dans la salle des fêtes d’un hôtel de luxe roumain, à Suceava, des matelas ont été installés pour les exilés venus d’Ukraine. 1/5 pic.twitter.com/xehKgTgufY

— Leslie Carretero (@CarreteroLeslie) March 4, 2022

En contrebas du site, où se trouve la salle des fêtes, l’agitation est à son comble ce 3 mars. Derrière la porte aux poignées couleur or, un brouhaha s’échappe du hall. Depuis le 24 février et le déclenchement de la guerre en Ukraine, le célèbre homme d’affaires roumain Stefan Mandachi a transformé cette immense pièce en dortoir pour les déplacés ukrainiens.

Environ 1 500 exilés accueillis à l’hôtel Mandachi

De jour comme de nuit, des dizaines de personnes poussent la porte de cet hôtel pour bénéficier d’un toit. L’annonce de son ouverture aux exilés a été publiée sur la page Facebook du gérant et est relayée au poste-frontière de Siret, à l’ouest de la Roumanie, par les citoyens et les humanitaires.

>> A (re)lire : Reportage : en Roumanie, la petite ville frontalière de Siret se mobilise face aux arrivées d’Ukraine

En à peine 10 jours, environ 1 500 hommes et femmes sont passés par la structure. Ce jeudi, ils étaient près de 300 mais le nombre varie en fonction des arrivées et des sorties. « On a eu jusqu’à 600 personnes en même temps », affirme Stefan Mandachi. Le jeune millionnaire ne quitte pas des yeux son téléphone, dont la sonnerie ne cesse de retentir.

Des femmes choisissent des vêtements, mis à leur disposition. Crédit : InfoMigrants

Le lieu, qui sert d’ordinaire aux réceptions de mariages, a revêtu des allures de centre d’hébergement d’urgence. Au rez-de-chaussée, les comptoirs des deux réceptions sont couverts de nourriture et de produits d’hygiène, à la disposition des exilés. En haut des escaliers, sous les lustres et les dorures, des centaines de matelas jonchent le sol. Des feuilles annotées de l’inscription « Free » (disponible, en français) sont posées sur les lits non occupés. Sur l’estrade surplombée d’une boule à facette, des tonnes de vêtements s’entassent. Les Ukrainiens n’ont plus qu’à se servir.

Dans l’espace de jeux improvisés pour les plus jeunes, des enfants s’amusent avec des cerceaux, des Lego ou des cartes. Leurs mères les surveillent de loin, les traits tirés. D’autres bambins se sont assoupis malgré le chahut. Les adolescents ne décrochent pas leur regard de leurs smartphones, connectés aux réseaux sociaux.

Des enfants s’amusent dans l’espace de jeux. Crédit : InfoMigrants

Lieu de transit

Maria, elle, discute avec sa grand-mère. Cette jeune femme d’une vingtaine d’années aux cheveux verts a débarqué quelques heures plus tôt à l’hôtel Mandachi, avec un sac à dos comme unique bagage. « J’ai juste pris le nécessaire, je n’avais pas beaucoup de temps », explique cette étudiante de Zaporijjia, au sud-est de l’Ukraine. Maria espère monter au plus vite dans un bus pour l’Allemagne, où vit son frère. « Je ne sais pas combien de temps le trajet va prendre, je préfère ne pas y penser », dit-elle, emmitouflée sous une couette.

Environ 1 500 personnes ont été accueillies à l’hôtel depuis son ouverture aux exilés. Crédit : InfoMigrants

Comme elle, les déplacés ne restent pas plus de quelques jours dans le bâtiment. Certains s’arrêtent seulement une heure ou deux pour se reposer, puis reprennent leur route. La grande majorité de ceux arrivés en Roumanie – environ 140 000 depuis le 24 février dont plus de 70 000 à Siret – ne s’installent pas dans le pays et rejoignent des proches en Italie, en Allemagne, en Espagne ou encore en France.

Stefan Mandachi est un célèbre homme d’affaires roumain. Crédit : InfoMigrants

Une quarantaine de bénévoles se relaient 24h/24 pour les informer sur les moyens de transport à prendre pour la suite de leur voyage. Ils transportent les valises, changent les draps ou distribuent des vivres.

Stefan Mandachi l’assure, son hôtel de luxe restera ouvert le temps qu’il faudra. « Tout dépend de la guerre. Si les combats perdurent, on continuera d’accueillir des gens. C’est important de se montrer solidaire des Ukrainiens en ce moment », estime-t-il, avant de repartir à toute vitesse prêter main forte aux humanitaires.

Plus de 1,5 million de personnes ont fui l’Ukraine depuis le début de l’invasion russe, selon les derniers décomptes de l’ONU publiés dimanche 6 mars.

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