Le bruit de la guerre ne s’arrête pas aux portes des salles de classe. Qu’ils aient repris le chemin de l’école quelques jours avant le déclenchement de l’offensive russe contre l’Ukraine, jeudi 24 février, ou qu’ils s’apprêtent à le faire, les enseignants sont soumis à un flot de questions. Et au « devoir » d’y répondre. Les élèves, abreuvés d’images et de vidéos sur les réseaux sociaux, vivent la guerre « quasiment en direct », rapportent bon nombre de professeurs de collège et de lycée.
« Est-on à la veille d’une troisième guerre mondiale ? », « Est-ce qu’il peut y avoir un conflit nucléaire ? », « Combien de villes ont été attaquées ? », « Combien y a-t-il de morts ? Combien de réfugiés ? », « Quelles seront les conséquences économiques » : voilà quelques-unes des questions que s’est vu poser Stéphane Rio, professeur d’histoire-géographie à Marseille, dont le lycée accueille un certain nombre d’élèves russophones ou d’origine slave. Cécile De Joie, qui enseigne les mêmes matières dans un établissement de l’Yonne, les entend aussi résonner dans ses classes de lycée, « avec d’autres, nombreuses, sur le rôle de l’OTAN, souligne-t-elle. Les interrogations des élèves sont pointues et elles évoluent au fil des jours ».
Chez les écoliers du primaire, les mots sont un peu différents, mais la quête de sens est la même. « Est-ce que nous sommes en danger ? », « Est-ce que mon père, mes grands frères vont partir faire la guerre ? », « Combien de temps ça va durer ? » : dans chaque classe, il y a toujours une poignée d’enfants – les plus informés, souvent aussi les plus exposés aux écrans – pour mettre en avant le sujet.
« Pourquoi la guerre ? »
Pour « mettre un peu d’ordre » dans ces questions, Hélène Feuilloley, enseignante dans une école d’Evreux, a demandé à ses élèves de CM2 de les coucher sur le papier. « Pourquoi la guerre ? » est l’interrogation qui lui semble la plus partagée. Avec une autre, posée par ceux de ces élèves, dont deux d’origine tchétchène, qui ont déjà l’expérience de la migration : « Est-ce qu’on va encore être obligés de partir ? »
« Il n’est pas question, au primaire, d’improviser un cours de géopolitique, avance Delphine Guichard, en charge d’un double niveau de CM1-CM2 dans une petite école de Sologne. La priorité, à cet âge, ce doit être de préserver les enfants de la fureur du monde. Mais l’école ne peut pas faire comme si elle était un sanctuaire. »
Les « limites » de leur sanctuaire, les professeurs les ont déjà éprouvées, disent-ils, à chaque « étape d’après » : « après » les attentats de 2015, « après » les vagues de Covid-19 et les mises à l’isolement répétées, et, aujourd’hui, « après » l’attaque de l’Ukraine. « On commence à s’habituer à parler en classe d’événements terribles, poursuit l’enseignante. Il faut être à l’écoute, taire nos angoisses pour se mettre à hauteur d’enfant, rassurer, expliquer… »
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