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Guerre en Ukraine : « Les inconnues d’un monde plus cher »

Récolte de blé, près de Kiev (Ukraine), en juillet 2019. ANATOLII STEPANOV / AFP

L’économie peut-elle changer le cours de la guerre ? C’est ce que tentent de démontrer les Occidentaux face à l’invasion de l’Ukraine par l’armée russe. Mais ce qui est certain, c’est que la guerre change l’économie. Comme les grandes épidémies, elle est un révélateur de tendances souterraines. Réveillée par le Covid-19, la machine de l’inflation s’emballe. Quatre moteurs l’animent furieusement.

Le premier est conjoncturel : le blocus de la Russie et de ses ports ajoute au chaos logistique, alors que le prix des transports de marchandises explose depuis 2019. Le deuxième moteur est celui du prix des matières premières. Du blé à l’aluminium, en passant par le cobalt, le lithium ou l’acier, les cours sont à des records historiques. Et pas seulement du fait des bombes qui tombent sur les champs de blé et les hauts-fourneaux d’Ukraine, mais aussi pour des raisons de fond, notamment liées à la transition énergétique.

Le prix de la souveraineté

C’est le troisième moteur, le plus puissant à long terme. L’impératif de décarbonation de nos économies, et donc du transport, de l’industrie et de la production d’énergie conduisent d’une part au renchérissement durable du prix du pétrole, à la suite de la baisse des investissements dans ce domaine, et d’autre part à une demande considérable pour construire éoliennes, panneaux solaires et batteries électriques. L’Allemagne entend accélérer encore sa reconversion électrique en passant au tout-renouvelable d’ici à 2035.

Or, ces nouvelles sources de production d’électricité consomment beaucoup plus de cuivre, de béton, de cobalt ou d’acier par quantité d’énergie produite que des centrales électriques classiques au gaz, au charbon ou au nucléaire. D’où l’appel d’air. A cela s’ajoute enfin le surcoût d’une production décarbonée pour fabriquer de l’acier sans charbon ou faire rouler une automobile sans essence. La transition énergétique ne sera pas gratuite.

Le spectre d’une sobriété imposée, c’est-à-dire une récession, plane avec son cortège de conflits de répartition dans un monde chauffé à blanc par la montée des inégalités

Le dernier moteur est celui du prix de la souveraineté. Quand la France prône la relocalisation industrielle ou que le président de la République, Emmanuel Macron, promet plus de souveraineté et d’indépendance pour l’Europe, cela signifie aussi la fin de l’optimisation des prix, fruit de vingt ans de mondialisation.

Tous les industriels le confirment, les prix vont encore monter. Laissant ouvertes deux inconnues fondamentales dans ce monde plus cher. Les salaires vont-ils suivre ? C’est le cas au Royaume-Uni, aux Etats-Unis et même en Allemagne. Et comment va réagir la demande ? Le spectre d’une sobriété imposée, c’est-à-dire une récession, plane avec son cortège de conflits de répartition dans un monde chauffé à blanc par la montée des inégalités. Après la guerre, il risque d’y avoir de la bagarre.

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