L’inflation dans la zone euro a pulvérisé un nouveau record en février, à 5,8% sur un an, toujours propulsée par la flambée de l’énergie, mais aussi désormais de l’alimentation, alors que la guerre en Ukraine fait craindre une folle envolée.
En janvier, l’inflation avait atteint 5,1%, ce qui représentait déjà le niveau le plus élevé enregistré par l’office européen des statistiques depuis le début de cet indicateur en janvier 1997 pour les 19 pays ayant adopté la monnaie unique. Depuis novembre, il s’est hissé chaque mois un nouveau sommet historique.
La hausse des prix à la consommation est toujours alimentée par la flambée des prix du pétrole, du gaz et de l’électricité. Les tarifs de l’énergie se sont envolés de 31,7% sur un an en février, après +28,8% en janvier.
Mais la progression des prix de l’alimentation (y compris alcool et tabac) s’est aussi accélérée le mois dernier, à 4,1%, après 3,5% en janvier. Cette accélération atteint aussi les autres composantes. Les biens industriels se sont renchéris de 3% sur un an en février, après 2,1% le mois précédent. Les prix des services restent relativement plus sages (+2,5% en février, contre 2,3% en janvier).
Cette hausse généralisée, plus importante que ce que prévoyaient les économistes, est une très mauvaise nouvelle pour les ménages, dont certains peinent de plus en plus à boucler les fins de mois. Elle est aussi un casse-tête pour la Banque centrale européenne (BCE) qui veille à la stabilité des prix. L’inflation actuelle dépasse très largement son objectif d’un taux de 2%.
Les combats en Ukraine alimentent les pires craintes sur le front économique, en particulier en matière de hausses de prix. D’abord annoncé l’an dernier comme temporaire, ce phénomène est appelé à durer.
La Russie est le principal fournisseur de gaz de l’UE et le deuxième exportateur mondial de pétrole. Mais c’est aussi une grande puissance agricole, tout comme l’Ukraine. La Russie est également un important pourvoyeur de métaux pour l’industrie.
– Situation imprévisible –
Les marchés s’affolent déjà, inquiets des conséquences du conflit pour l’approvisionnement mondial.
Les cours de référence du pétrole brut se sont envolés mercredi à des niveaux plus observés depuis près d’une décennie, à plus de 110 dollars le baril. Record aussi pour le cours européen de référence du gaz naturel, le TTF néerlandais, qui s’est envolé mercredi à 194,715 euros le mégawattheure (MWh).
La tonne d’aluminium, dont la Russie est le troisième producteur mondial, a culminé mercredi à 3.552 dollars à Londres, un sommet historique.
Les prix du blé meunier et du maïs sont aussi au plus haut en Europe, tout comme les huiles de soja et de palme.
La Russie et l’Ukraine sont respectivement premier et quatrième exportateurs mondiaux de blé, ainsi que sixième et quatrième pour le maïs, selon les estimations du ministère américain de l’Agriculture (USDA).
« L’invasion de l’Ukraine par la Russie va probablement déterminer les prix du gaz et du pétrole dans les mois à venir » et « les sanctions internationales vont augmenter le risque de nouvelles hausses », s’est inquiété Fritzi Köhler-Geib, économiste de la banque publique allemande KfW.
Mais « ce n’est plus seulement l’énergie. Les prix de l’alimentation augmentent aussi en raison du conflit, et cela augmente les craintes d’une inflation élevée sur les prochains mois », a souligné Bert Colijn de la banque ING.
« La situation concernant la Russie et l’Ukraine évolue tellement vite actuellement que personne ne peut prédire son impact effectif sur l’économie », a-t-il ajouté, en estimant que la BCE devrait dans ce contexte s’abstenir de tout engagement important sur sa politique monétaire pour l’année en cours.
Jack Allen-Reynolds, de Capital Economics, se risque toutefois à un pronostic. Il anticipe une hausse très probable de l’inflation à « plus de 6% dans les prochains mois » et pense qu’elle restera au-dessus de 2% jusqu’à l’an prochain « si ce n’est plus longtemps encore ».
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