Livre. Lorsqu’on termine la lecture de l’enquête, très dense et touffue, que Marc Endeweld consacre à la place économique, diplomatique et militaire de la France d’Emmanuel Macron dans le monde, on a le sentiment d’être Fabrice, le jeune héros de La Chartreuse de Parme qui, en plein cœur de la bataille de Waterloo, ne voit ni ne comprend rien, tandis que l’histoire se dessine sous ses yeux.
Avec L’Ambigu Monsieur Macron (Flammarion, 2015), Marc Endeweld a été l’un des premiers à enquêter sur le huitième président de la Ve République, alors qu’il n’était encore que ministre de l’économie. Quatre ans plus tard, le journaliste indépendant récidivait dans Le Grand Manipulateur. Les réseaux secrets de Macron (Stock, 2019). Depuis, il poursuit de manière méthodique son fil conducteur : celui des luttes de pouvoir et des batailles fratricides entre grands commis de l’Etat et chefs d’entreprise ambitieux qui œuvrent dans les coulisses de la République ; en remontant pour certaines de ses affaires à leur origine, sous les présidences de François Mitterrand et de Jacques Chirac, comme par exemple en ce qui concerne l’affaire de la vente de frégates militaires à Taïwan.
Car pour l’auteur, depuis vingt ans, une nouvelle guerre froide économique s’est abattue sur la planète. De la récente crise des sous-marins australiens, aux déboires d’Areva et son EPR qui ne fonctionne pas, en passant par le scandale des écoutes du logiciel Pegasus ou la montée en puissance du chinois Huawei dans les télécoms, la France mais aussi l’Union européenne se font doubler dans presque tous les secteurs stratégiques. Soit par les Etats-Unis, qui épient leurs alliés, soit par les Chinois, qui copient et surpassent les Occidentaux.
Réveil douloureux
Ce changement d’époque peut être daté de deux manières. Pour le grand public, la référence reste le 11 septembre 2001, mais, à lire Marc Endeweld, le moment-clé se situerait plutôt trois mois plus tard, le 11 décembre, jour de l’adhésion de la Chine à l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Deux décennies plus tard, l’emprise de Pékin sur le reste du monde est devenue presque totale et le réveil apparaît douloureux pour les Occidentaux.
Parmi les nombreux récits d’affaires traités, le journaliste met en perspective l’annonce faite par Vincent Bolloré, en octobre 2021, de vendre ses activités africaines. Le groupe français étant en concurrence avec le géant maritime MSC, dirigé par la famille Aponte, qui a ses entrées à l’Elysée. Alexis Kohler, actuel secrétaire général de l’Elysée, fut employé du groupe italo-suisse et a des liens de famille par son épouse avec ses dirigeants. Selon une source de l’auteur : « L’épicentre des difficultés pour Bolloré, c’est Kohler » et non Macron. Et ce alors que, en arrière-plan, le journaliste décrit la montée en puissance de la Chine sur le continent africain pour la maîtrise stratégique des ports et celle des câbles sous-marins de télécommunications.
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