C’est une nouvelle fois au nom de « l’indépendance énergétique de la France » qu’Emmanuel Macron a annoncé, le 9 novembre 2021, sa décision de relancer la filière nucléaire et de construire une série d’EPR. Décision confirmée et précisée le 10 février.
Nous ne nous focaliserons pas sur les interrogations fortes qui pèsent sur cette décision : les énergies renouvelables sont déjà moins onéreuses que le nucléaire, et l’EPR n’a pas fait, loin s’en faut, ses preuves (retards conséquents, malfaçons nombreuses), alors que ses coûts et ses surcoûts de production sont plus élevés que ceux des énergies renouvelables.
La question des déchets nucléaires n’est pas non plus réglée, et les importantes sommes nécessaires à la rénovation des centrales actuelles, dont plusieurs [réacteurs] sont à l’arrêt pour des problèmes techniques ou de maintenance, seront forcément utilisées au détriment de l’investissement dans le renouvelable. Enfin, les longs délais de construction des EPR ne répondent pas à l’urgence d’une substitution la plus rapide possible du pétrole comme du gaz, nécessaire pour faire face au dérèglement climatique.
Nous n’insisterons pas non plus sur la façon dont le président a pris sa décision, particulièrement opaque sur un enjeu qui pourtant engage la société sur le long terme : son choix était manifestement fait avant la publication, en octobre 2021, du rapport « Futurs énergétiques 2050 » de RTE (Réseau de transport d’électricité). Celui-ci n’a, d’ailleurs, pas fait l’objet des débats promis de façon approfondie : le scénario 100 % renouvelable n’a même pas été développé dans l’étude, ce qui en dit long sur des choix déjà tranchés et sur la conception de la décision publique.
Uranium importé
En tant que chercheurs, universitaires et experts ayant une connaissance approfondie du Niger, c’est un autre point, certes moins débattu dans l’espace public, que nous voulons contester : celui de l’« indépendance énergétique de la France » que permettrait le nucléaire. Ce mensonge repose sur un postulat stratégiquement contestable : la France contrôlerait le prix de l’uranium produit par Areva (devenu Orano en 2018), au Niger comme ailleurs.
Le pic de production a été atteint en France dans les années 1980 et la dernière mine d’uranium a été fermée en 2001. Cent pour cent de l’uranium utilisé chaque année par nos centrales (soit de 8 000 à 9 000 tonnes) est donc importé et provient du Niger, du Kazakhstan, d’Ouzbékistan, du Canada et d’Australie. Dans ces conditions, comment peut-on parler d’indépendance énergétique ? Il doit être, au contraire, très clair que nous sommes aussi dépendants de l’étranger pour l’uranium que pour le gaz et le pétrole.
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