L’Etat du Karnataka est bousculé depuis plusieurs semaines par une violente bataille autour du port du voile à l’école. L’affaire n’est pas sans lien avec les élections régionales en cours dans cinq Etats de l’Inde. Elle est agitée comme un épouvantail par les milieux nationalistes hindous.
Le différend a commencé fin décembre dans une université de cet Etat du sud du pays, lorsque huit jeunes filles musulmanes de 16 ans ont été interdites d’accès dans un établissement du district d’Udupi, une ville située au bord de la mer d’Oman, pour avoir refusé d’enlever leur foulard, dont le port était permis jusque-là. Pour justifier son interdiction, la direction a argué de l’adoption d’un code vestimentaire, une décision à laquelle s’opposent les familles musulmanes, qui revendiquent le droit à la liberté de religion.
L’histoire s’est vite répandue sur le Web et dans la presse. D’autres écoles ont commencé à appliquer une interdiction similaire des hidjabs, entraînant de nouvelles manifestations et contre-manifestations. Pour protester contre le port du foulard, des étudiants hindous ont commencé à brandir des écharpes safran, la couleur des nationalistes, et à scander des chants religieux.
Laboratoire de l’« hindouité »
Le 4 février, le gouvernement du Karnataka, dirigé par le Bharatiya Janata Party (BJP), la formation du premier ministre indien, Narendra Modi, a soutenu l’interdiction, jetant de l’huile sur le feu. Le chef régional du BJP, Nalin Kumar Kateel, a notamment déclaré que l’interdiction du hidjab permettrait d’éviter que les salles de classe ne deviennent semblables à celles du régime des « talibans ». La situation est devenue si tendue que les autorités ont décidé la fermeture temporaire des écoles, avant de les rouvrir sous surveillance policière.
Les jeunes étudiantes musulmanes ont saisi la Haute Cour du Karnataka, qui doit statuer sur l’interdiction du port du voile. La tension ne retombe pas. Samedi 19 février, une soixantaine d’étudiantes ont été suspendues dans le district de Shivamogga après avoir refusé d’enlever leur foulard.
Ce n’est pas la première fois que cet Etat s’en prend aux minorités religieuses. Le gouvernement régional a adopté, en décembre 2021, une loi anticonversion qui prévoit une peine de prison de dix ans pour les personnes jugées coupables de conversions forcées. Ces dispositions visent la communauté chrétienne, accusée de convertir les hindous, et ont été adoptées alors que le Karnataka enregistrait une série d’attaques contre les églises. Une autre loi interdit, depuis février 2021, l’abattage des vaches, taureaux et buffles et vise la communauté musulmane. Le Karnataka est aussi un laboratoire de l’hindutva, concept de l’« hindouité » chère aux nationalistes du BJP, et les organisations radicales hindoues y opèrent depuis une dizaine d’années.
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