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En Équateur, la fuite de pétrole dans la forêt amazonienne “était prévisible”

Publié le : 21/02/2022 – 13:31

Plus d’un million de litres de pétrole se sont déversés dans la forêt amazonienne en Équateur, à la suite de la rupture d’un oléoduc, vendredi 28 janvier. Selon OCP, l’entreprise privée qui le gère, il a été endommagé par des chutes de pierres, provoquées par l’érosion et de fortes pluies. OCP a également déclaré que l’incident n’était « pas prévisible ». Mais ce n’est pas l’avis de notre Observateur, qui témoigne dans notre émission.

L’oléoduc, qui a été endommagé vendredi 28 janvier, est situé à la limite entre les provinces de Napo et de Sucumbíos, en Équateur. 

Rupture de l’oléoduc d’OCP dans la province de Napo, à la limite avec la province de Sucumbíos, le 28 janvier.

L’équivalent de 6 300 barils de pétrole – soit plus d’un million de litres – se sont ensuite écoulés dans les rivières Coca et Napo. Environ 21 000 mètres carrés de la réserve Cayambe-Coca, une zone protégée, ont été touchés.

Vue aérienne montrant le pétrole s’écouler dans la rivière Coca, le 29 janvier. © Nicolas Mainville (Amazon Frontlines).

Après la rupture de l’oléoduc le 28 janvier, le pétrole s’est écoulé dans les rivières Coca et Napo, en direction du Pérou. © Les Observateurs de France 24.

« Les communautés indigènes vivent des rivières Coca et Napo »

L’avocat Luis Xavier Solis est spécialisé dans la défense des droits de l’Homme, au sein de la Fondation Alejandro Labaka. Il vit dans la province d’Orellana, qui a été touchée par la fuite de pétrole. Interrogé dans notre émission, il estime que c’est une catastrophe pour les habitants, au-delà de l’impact environnemental : 

Les communautés indigènes, qui habitent le long des rivières Coca et Napo, vivent de ces cours d’eau. On parle quand même d’environ 27 000 personnes, des Quechua. Elles boivent l’eau des rivières, elles se lavent dans les rivières, elles lavent leurs habits dans les rivières, elles naviguent sur les rivières, elles consomment les aliments qu’il y a dans les rivières… Et tout cela a été abîmé.

Vidéo tournée le 3 février, dans la province d’Orellana : un homme montre les taches de pétrole qui se trouvent au bord de la rivière Coca. 

En Équateur, deux oléoducs transportent le pétrole depuis l’Amazonie jusqu’à la côte Pacifique : celui qui vient d’être endommagé, géré par OCP (Oleoducto de Crudos Pesados), une entreprise privée équatorienne, et le SOTE (Sistema de Oleoducto Transecuatoriano), géré par PetroEcuador, une entreprise publique.

Un oléoduc situé dans un environnement à risques

Le 28 janvier, OCP a déclaré que son oléoduc avait été endommagé par des chutes de pierres, provoquées par l’érosion et de fortes pluies, et que l’incident n’aurait « pas pu être prévu« . 

Pourtant, le transit du pétrole avait été suspendu dans ce secteur en décembre, précisément en raison de l’érosion des sols. OCP et PetroEcuador avaient alors construit des dérivés alternatifs à leurs oléoducs.

Luis Xavier Solis indique :

Nous avons dit, à plusieurs reprises, que cette fuite était prévisible, et qu’elle aurait même pu être évitée. Des scientifiques et diverses organisations, comme la nôtre, ont dit qu’il ne fallait pas continuer à avoir un oléoduc au bord d’une rivière, dans une zone si exposée à des glissements de terrains, à des chutes de pierres, et proche d’un volcan. Mais ces avertissements ont été ignorés par l’État et OCP.

Des centaines de fuites de pétrole au cours des dernières années

De plus, d’autres fuites de pétrole, plus ou moins importantes, avaient déjà eu lieu dans la zone dans le passé. En avril 2020, les deux oléoducs – OCP et SOTE – avaient ainsi été endommagés au même endroit : l’équivalent de plus de 15 000 barils de pétrole s’étaient alors écoulés. En mai 2013, l’équivalent de 11 000 barils s’étaient déversés, quelques kilomètres plus loin. En février 2009, toujours dans la même zone, l’équivalent de 14 000 barils environ s’étaient également écoulés. 

Et les exemples sont encore nombreux, car selon plusieurs sources, des centaines de fuites de pétrole se sont produites dans le pays, ces dernières années.

Selon la Confédération des Nations indigènes de l’Équateur, « chaque semaine, plus de deux fuites de pétrole ont lieu en Amazonie », soit plus d’une centaine par an. Une enquête du site Internet équatorien Plan V parle également de deux fuites de pétrole par semaine et affirme : « Entre 2015 et juin 2021, 899 fuites de pétrole ont été recensées. » De son côté, l’ONG Amazon Frontlines indique : « Selon le ministère de l’Environnement équatorien, plus de 1 169 fuites de pétrole ont été officiellement signalées entre 2005 et 2015 en Équateur, dont 81 % ont eu lieu en Amazonie. » 

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Photos prises dans la province d’Orellana, à la suite de la fuite de pétrole d’avril 2020. © Telmo Ibarburu.

Luis Xavier Solis conclut :

Quand une fuite survient, les entreprises qui transportent le pétrole disent toujours que ce sont des ‘cas de force majeure’, pour dire qu’elles n’en sont pas responsables. Sans compter qu’elles ont toujours tendance à minimiser leur impact…


Vidéo tournée à la limite entre les provinces de Napo et Sucumbíos, le 28 janvier. On y voit le pétrole s’écouler le long d’une route, en direction de la rivière Coca. © Vidéo amateur.

Source

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