Procureurs anticorruption, juges indépendants, enquêteurs d’une commission contre l’impunité : le gouvernement du Guatemala et son bras judiciaire, la procureure générale et chef du ministère public (MP), Consuelo Porras, mènent une véritable croisade contre ceux et celles qui, au Guatemala, s’attaquent aux puissants corrompus.
Derniers en date, deux auxiliaires du Parquet spécial contre l’impunité (FECI) ont été arrêtés, mercredi 16 février, pour leur « possible responsabilité dans le délit d’abus d’autorité ». Willy Roberto Racanac Lopez et Paola Mishelle Escobar Quiñonez sont accusés d’avoir exercé des pressions sur un témoin pour l’inciter à faire une fausse déclaration. Un mandat d’arrêt a été lancé contre deux autres auxiliaires du FECI pour la même raison.
Deux jours plus tôt, le 15 février, c’était l’avocate Eva Xiomara Sosa, ex-procureure de la FECI, qui était arrêtée ; et avant elle, le 10 février, Leily Santizo, enquêtrice pendant onze ans au sein de la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (Cicig). Toutes deux, a précisé le responsable de communication du MP, Juan Luis Pantaleon, pour la « possible commission du délit d’obstruction de justice ». Interrogé par Le Monde sur les circonstances de ce délit présumé, M. Pantaleon a répondu que « l’affaire se trouve sous le sceau du secret judiciaire ».
« Les mafias se sont emparées du système de justice »
Consulté depuis Washington où il a dû s’exiler car lui-même poursuivi, l’ancien chef du FECI, Juan Francisco Sandoval, a estimé, au contraire, que « l’arrestation de procureurs du FECI est une claire illustration de comment les mafias se sont complètement emparées du système de justice ».
Le FECI a été créé en 2008 au sein du MP pour collaborer avec la Cicig, un organisme mis en place par l’ONU l’année précédente, dans les enquêtes sur les affaires de corruption. Ensemble, pendant plus de onze ans, FECI et Cicig ont permis d’identifier 60 structures criminelles et d’arrêter et de faire juger de dizaines de politiciens, militaires, chefs d’entreprise, considérés jusque-là comme intouchables. En 2015, le président du pays, Otto Pérez Molina (2012-2015), et sa vice-présidente, Roxana Baldetti, avaient même été contraints à la démission, accusés d’association illicite et de fraude sur les revenus douaniers.
Grâce à ce travail conjoint, le petit pays centraméricain, jusque-là gangrené par le crime organisé, est devenu une « référence régionale et mondiale en matière de lutte contre l’impunité », d’après le rapport « Guatemala : éviter un recul de dix ans en matière de justice », de la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH).
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