C’était en décembre 2021, lorsqu’il est apparu que la Russie amassait ses troupes aux portes de l’Ukraine. Soudain, le Minerva Chios, un méthanier en provenance de Louisiane, fit demi-tour, alors qu’il était en plein océan Indien. Direction l’Europe, via le canal de Suez, avec sa cargaison de gaz naturel liquéfié (GNL) américain. Il en fut de même pour le Maran Gas Vergina, venu du Delaware, qui approchait le détroit de Malacca : il fit demi-tour pour décharger en Turquie. Le Marvel Crane, qui allait emprunter le canal de Panama pour l’Asie prit la direction de l’Espagne. Le Vieux Continent, si dépendant du gaz russe, devenait soudain attractif et les armateurs détournaient leurs cargaisons pour les meilleurs acheteurs.
Ces détournements en pleine mer sont marginaux dans l’approvisionnement de l’Europe. Selon le Wall Street Journal, 40 % des importations de l’Union européenne venaient de Russie en 2019 – 22 % de Norvège, 7,2 % d’Algérie et 4,6 % du Qatar. Mais il est un nouveau venu dans la partie, les Etats-Unis.
Grâce à l’exploitation des schistes bitumineux, le pays est devenu le premier producteur mondial d’hydrocarbures, devant l’Arabie saoudite et la Russie. Les Etats-Unis ont commencé à exporter leur production à partir de 2016, le président Obama ayant aboli une interdiction d’exportation datant de 1975 après le premier choc pétrolier. Six ans après avoir expédié leur premier méthanier, ils devraient devenir en 2022 les premiers exportateurs de GNL, devant le Qatar et l’Australie, grâce à l’ouverture de nouveaux terminaux au Texas et en Louisiane.
S’affranchir du gaz russe
Les Etats-unis, dont la moitié des exportations est destinée à l’Asie, volent désormais au secours des Européens, avec des exportations quadruplées en un an (5 millions de tonnes en janvier).
Ils rêvent surtout d’empêcher l’inauguration au second semestre du gazoduc Nord Stream 2, censé fournir à l’Allemagne la moitié de son gaz via la Baltique sans passer par l’Ukraine. « Si la Russie envahit, alors il n’y aura plus de Nord Stream 2. Nous y mettrons fin », a prévenu Joe Biden, lors d’une rencontre à la Maison Blanche avec le chancelier allemand le 7 février, assurant qu’il en avait les moyens même si c’est l’Allemagne qui en a le contrôle. « Je vous le promets, nous sommes capables de le faire », a déclaré le président américain. Olaf Scholz a répondu dans une parfaite ambiguïté : « Nous serons unis. Nous agirons ensemble. Et nous prendrons toutes les mesures nécessaires. »
Pour aider l’Europe à s’affranchir du gaz russe, encore faut-il que celle-ci soit dotée des infrastructures nécessaires. L’Allemagne ne dispose pas de terminal méthanier et s’aperçoit soudain de sa dépendance. « Le gaz liquéfié est une solution alternative à l’importation de gaz russe », a expliqué le porte-parole du chancelier Scholz, rappelant que « plusieurs projets » de terminaux étaient en gestation, au nord du pays.
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