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Dopée par les déboires du nucléaire, la centrale de Saint-Avold meurt en bonne santé

Au milieu des tonnes de charbon dont il a la charge, Sylvain Krebs avoue avoir un « petit pincement au coeur » devant une page de l’histoire de la Moselle qui se tourne avec la fermeture annoncée, le 31 mars, de la centrale de Saint-Avold.

En attendant sa mise à mort, cette centrale – l’une des deux dernières fonctionnant au charbon sur le sol français avec celle de Cordemais (Loire-Atlantique) – tourne pourtant à plein régime afin de pallier l’arrêt impromptu de plusieurs réacteurs nucléaires d’EDF.

Un regain d’activité permis par un décret ministériel du 5 février qui l’autorise à fonctionner 1.600 heures jusqu’à son arrêt définitif, au lieu des 700 heures prévues initialement.

Dans la salle des commandes de la centrale Emile Huchet, à cheval sur les communes de Saint-Avold et Carling, David George ne lâche pas les écrans du regard. « Tout est informatisé maintenant, avant c’était des boutons », dit-il en montrant une photo prise dans les années 1980.

« Ce n’est pas qu’une industrie qui ferme mais une page qui se tourne » dans une région, la Lorraine, qui a déjà fait le deuil de ses mines de charbon et de ses gueules noires, relève ce cadre technique de 49 ans.

S’il reconnaît une pointe de « nostalgie », Sylvain Krebs, tout comme ses collègues, était bien conscient que le charbon, « ça finirait » un jour, et bien conscient aussi des « effets nocifs » sur l’environnement avec des émissions massives de CO2. Mais tout de même : « Pendant 150 ans, on en a profité ».

Désormais, les salariés de la centrale entendent devenir des « pionniers » des énergies vertes en France. « J’espère qu’on va recréer une activité pour 200 ans comme ce qui s’était passé avec le charbon, mais cette fois-ci avec l’hydrogène » qui devrait être produite sur le site à l’avenir, s’enthousiasme Sylvain Krebs, 46 ans.

– Du charbon à la biomasse –

En attendant, les installations vont être démantelées pour permettre la construction d’une chaudière fonctionnant avec la biomasse, un projet que l’Etat entend soutenir à hauteur de 12,7 millions d’euros, avait indiqué en décembre la ministre de l’Industrie Agnès Pannier-Runacher.

« On va développer une chaudière biomasse de 20 mégawatts qui va brûler du bois à la place du charbon », explique ainsi Camille Jaffrelo, porte-parole de GazelEnergie, l’entreprise propriétaire de la centrale Emile Huchet.

Cette future chaudière devrait permettre de fournir de la « chaleur verte » aux industriels de la plateforme chimique voisine de Carling, précise-t-elle.

L’environnement y trouvera-t-il son compte ? Comme d’autres associations, France Nature Environnement en doute. Pour Michel Dubromel, responsable des questions énergétiques au sein de l’ONG, la nouvelle installation sera certes « moins polluante » que la centrale à charbon, mais à condition de ne pas « raser des forêts » pour la faire fonctionner.

– Inquiétudes sur l’emploi –

Le directeur de la centrale, Philippe Lenglart, espère, lui, voir le chantier débuter dans les premiers mois de 2023.

Sur les 87 salariés de la centrale à charbon, 49 vont partir à la retraite, huit ont reçu des promesses d’embauche au sein de la nouvelle installation et deux restent « sans solution », précise-t-il, expliquant que les autres, qui ont bénéficié d’un plan de départs volontaires, ont trouvé des emplois « à l’extérieur de l’entreprise ».

La future chaudière devrait employer à terme une vingtaine de salariés auxquels devraient s’ajouter ceux oeuvrant à la production d’hydrogène. Mais pas de quoi rassurer pleinement Pascal Bernardi, délégué syndical de Force Ouvrière de la centrale. Le projet, remarque-t-il, n’est pas encore « gravé dans le marbre ».

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