Tribune. Le 25 mars 2022 marquera le 65e anniversaire du traité de Rome. Celui-ci a donné naissance à la Communauté économique européenne qui rassemblait des pays, à peine sortis de la guerre, dans un projet de coopération économique. Cette idée visionnaire a incité nos pays à dialoguer de manière constante pour assurer une paix durable. Les pères fondateurs du projet européen étaient conscients qu’ils ne pouvaient fonctionner qu’avec l’adhésion des peuples. Coopération et convergence économiques devaient avancer de concert avec le partage du bien-être. La promesse de prospérité que portait la convergence économique se devait donc d’être accompagnée d’une convergence sociale. Promesse partiellement tenue.
La construction d’une Europe sociale a été plus longue et plus tortueuse que la construction économique. Les avancées telles que l’adoption de l’euro ont renforcé l’intégration et l’interdépendance des économies des Etats membres, mais elles n’ont pas empêché que la perception d’un fossé entre institutions et citoyens se répande. Faute d’instruments européens permettant de compenser les déséquilibres sociaux qui en ont résulté, l’Europe a pu être perçue comme un espace exclusivement au service des intérêts économiques et financiers. La crise de 2008 a renforcé cette image. En accentuant la méfiance envers les institutions européennes, elle a favorisé le développement des mouvements populistes et eurosceptiques ou europhobes.
Il aura fallu attendre presque dix ans pour que les questions sociales reviennent enfin au cœur des débats politiques. L’adoption du Socle européen des droits sociaux en 2017 a ainsi marqué un tournant. De même, l’approche solidaire pour répondre à la crise sanitaire de l’épidémie de Covid témoigne de l’importance de cette dimension sociale. Pourtant, les avancées sont encore trop timides au vu des défis auxquels nous devons faire face.
Les travailleurs européens veulent une Europe sociale forte, solidaire et protectrice. Aujourd’hui, en amont du conseil informel des ministres des affaires sociales et de l’emploi, nous nous mobilisons pour exiger des décideurs européens un rattrapage des années de retard en approuvant d’ici à l’anniversaire du traité de Rome une directive européenne sur les salaires minimum et la négociation collective la plus ambitieuse possible.
Cette directive doit imposer aux Etats membres où le salaire minimum légal existe de le fixer à des niveaux décents pour que chaque travailleur et travailleuse puisse vivre dignement de son travail en Europe. Tout en préservant les bonnes pratiques nationales déjà en vigueur dans certains pays garantissant l’autonomie des partenaires sociaux, la directive doit aussi imposer aux Etats membres de définir avec les partenaires sociaux eux-mêmes les mesures nécessaires pour développer et renforcer la négociation collective dans tous les pays européens. Car la négociation collective, surtout au niveau interprofessionnel et de branche, est le meilleur outil pour fixer des salaires justes et un partage plus équitable des richesses produites par les travailleuses et les travailleurs. Au-delà de la question des salaires, la négociation collective permet également d’obtenir des améliorations des conditions de vie au travail et une meilleure implication des travailleurs dans les choix de leurs entreprises.
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