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L’adolescent russe qui voulait virtuellement faire « sauter le FSB » condamné à cinq ans de prison

Les cahiers d’écolier et les lettres de Nikita Ouvarov, accusé de terrorisme, dans la ville de Kansk, en Sibérie, le 3 avril 2021. MARIA TURCHENKOVA POUR « M LE MAGAZINE DU MONDE »

Nikita Ouvarov, 16 ans, est un terroriste. Ainsi en a jugé, jeudi 10 février, le tribunal militaire russe appelé à statuer sur le sort de cet adolescent rebelle, coincé dans une ville de Sibérie à l’horizon bouché. Il a été condamné à cinq ans de prison pour s’être « préparé à la conduite d’activités terroristes ».

Etant donné le dossier, qui reposait sur des éléments extrêmement ténus, c’est un verdict très lourd. Il semble toutefois avoir été prononcé comme une sorte de demi-mesure : l’accusation réclamait en effet neuf ans, et six ans contre ses deux complices, les amis avec lesquels il avait créé un cercle anarchiste dans leur ville de Kansk. Ceux-ci sont condamnés mais exemptés de peine pour avoir coopéré à l’enquête.

Ce dernier point est surprenant, les deux garçons ayant au contraire expliqué au cours du procès que leurs aveux avaient été extorqués sous la pression. Nikita Ouvarov était poursuivi de façon plus sévère car il a toujours refusé d’avouer et était considéré comme le chef du groupe. Il a déjà passé onze mois en détention provisoire, dans des conditions punitives : durant cette période, sa mère a vu toutes ses demandes de parloir rejetées, et le premier coup de téléphone à son fils n’a été autorisé qu’au bout de sept mois de détention.

Fabrication de cocktails Molotov

Le verdict a été rendu par un tribunal militaire venu spécialement d’Extrême-Orient pour le procès. La veille, l’avocat de l’adolescent, Vladimir Vasin, disait garder l’espoir d’un acquittement, expliquant que les audiences s’étaient déroulées « de manière beaucoup plus correcte, s’agissant du respect des procédures, qu’un tribunal civil ». Mais en Russie, les tribunaux ne prononcent un acquittement que dans 0,3 % des affaires jugées.

Dans les quelques médias russes qui en ont rendu compte, l’affaire est vite devenue « le procès Minecraft », car le seul projet d’attentat clairement mentionné dans le dossier est celui que les trois garçons, âgés alors de 14 à 15 ans, ont fomenté dans ce jeu vidéo où les utilisateurs peuvent modéliser des bâtiments. Ils évoquaient ainsi l’idée d’y faire « sauter le FSB », les services russes de sécurité. Projet qui cohabitait, dans leur longue correspondance que Le Monde avait pu consulter, avec d’autres : « Casser la vitre arrière de la voiture d’un agent », « jeter une grenade dans le bania [sauna] de Poutine » ou construire « un canon magnétique ».

Nikita Ouvarov et ses amis reconnaissaient uniquement la « préparation de matériel explosif » : ils ont en effet fabriqué à plusieurs reprises des cocktails Molotov, qu’ils ont fait exploser dans les bâtiments abandonnés familiers du paysage de Kansk, se filmant hilares. Ils demandaient à être condamnés selon cette charge, mais niaient tout projet d’attentat et présentaient ces activités comme un jeu.

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