Les dirigeants occidentaux le savent : ce n’est qu’en se montrant unis face à Vladimir Poutine qu’ils pourront agir face aux menaces que le président russe fait peser sur l’intégrité de l’Ukraine et, au-delà, sur la sécurité du continent européen. Dans ce contexte, la rencontre organisée entre le chancelier allemand, Olaf Scholz, et les présidents français et polonais, Emmanuel Macron et Andrzej Duda, mardi 8 février, à Berlin, est en soi une petite victoire diplomatique : depuis la crise ukrainienne de 2014, les trois pays n’avaient pas délivré de message commun.
Le président polonais, Andrzej Duda, et son homologue français, Emmanuel Macron, entourent le chancelier allemand, Olaf Scholz, en conférence de presse à Berlin, le 8 février 2022. JEAN-CLAUDE COUTAUSSE POUR «LE MONDE»
Ce message, les trois hommes l’ont formulé tour à tour, lors d’un bref point presse, avec des mots quasi identiques. « Nous partageons un objectif : préserver la paix en Europe », a déclaré M. Scholz. « Nous devons trouver une solution pour éviter la guerre », a enchaîné M. Duda. « La paix et la stabilité du continent européen sont notre trésor, et notre devoir est de le préserver », a affirmé M. Macron.
Aucune question n’avait été prévue pour les journalistes, et ce n’était sans doute pas un hasard : en se bornant à des déclarations n’excédant pas une dizaine de minutes au total, les trois dirigeants ont pu s’en tenir à des propos assez généraux et éviter des échanges qui auraient sans doute conduit à mettre en lumière leurs divergences.
« Symbole très fort »
Celles-ci sont réelles. Ces dernières semaines, la Pologne n’a pas caché son agacement vis-à-vis de l’Allemagne et de la France, jugées trop conciliantes avec le Kremlin, la première en refusant obstinément de livrer des armes à l’Ukraine, la seconde en proposant de construire une « nouvelle architecture de sécurité » avec la Russie. Autant d’initiatives qui ont conforté les Polonais dans l’idée que seule l’Alliance atlantique pouvait garantir leur sécurité. « Une fois de plus, il ne nous reste plus que l’Amérique », titrait ainsi, dans son éditorial du 25 janvier, le quotidien conservateur Rzeczpospolita.
Dans un tel contexte, la réactivation du triangle de Weimar, nom donné à cette structure informelle de concertation, créée, en 1991, entre la France, l’Allemagne et la Pologne, a au moins le mérite de montrer que les trois pays, dont les relations se sont dégradées ces dernières années, notamment à cause des atteintes portées par Varsovie aux principes de l’Etat de droit, éprouvent la nécessité de se rapprocher quand l’essentiel est en jeu : la paix en Europe. « Que la France et l’Allemagne s’affichent avec la Pologne, avec laquelle il y a des désaccords européens forts, est un symbole très fort de la solidarité européenne face à la Russie : la Pologne est toujours radicale, les Allemands sont considérés comme le “maillon faible” face à Poutine, et les Français sont ambivalents. L’initiative d’Olaf Scholz de faire cette rencontre à Berlin montre la volonté de l’Allemagne de se présenter comme un partenaire fiable », observe Paul Maurice, chercheur au comité d’études des relations franco-allemandes à l’Institut français des relations internationales.
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