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« Il est temps que l’Union européenne s’engage avec courage pour traiter la crise ukrainienne »

Tribune. Le rêve des Européens d’être entourés de partenaires et d’amis dans tout leur voisinage est loin de la réalité de nos jours : l’Europe est cernée par des zones de conflit et de risque, de la Russie jusqu’à l’Afrique du Nord, du Sahel jusqu’au Moyen-Orient. Au-delà de leurs spécificités, ces développements négatifs relèvent aussi d’une responsabilité partagée, à la suite d’une chaîne d’erreurs ou d’incompréhensions. Nous n’avions ni écouté « l’autre » ni évalué correctement les changements en cours, en termes d’opportunités ou de risques – et surtout, nous n’avons pu su développer une véritable politique étrangère commune !

L’Ukraine est exemplaire à cet égard. C’est une zone de conflit latent depuis la fin de l’Union soviétique, accentuée par l’histoire commune du pays avec la Russie et par des sensibilités particulières des deux côtés. Souvenons-nous de son évolution depuis 1991 : dès le départ, son futur fait partie des contentieux et des « accords sur les désaccords » entre Russes et Occidentaux. En réalité, la Russie n’a jamais accepté la souveraineté de l’Ukraine.

Par l’annexion de la Crimée comme par son ingérence agressive à l’est de l’Ukraine, la Russie joue avec le feu. Elle cherche à regagner à tout prix sa place de grande puissance. Elle veut être située de nouveau à égalité avec les Américains, à travers des pourparlers bilatéraux directs. L’Union européenne (UE), en partie désunie à l’égard de ses voisins de l’Est, est reléguée au deuxième rang, malgré les efforts de la part de la France et de l’Allemagne, notamment avec le « format Normandie » [réunion entre la France, l’Allemagne, l’Ukraine et la Russie, initiée à l’occasion des célébrations du débarquement, en Normandie, en 2014].

A l’Ouest, en particulier au sein de l’Alliance atlantique, la politique face à la Russie semble plutôt faire marche arrière. Les signaux positifs et les chances d’il y a vingt ans sont oubliés. C’est l’hubris de la victoire qui règne, le refus de penser la Russie autrement que comme un ennemi perdant de l’histoire. Les conséquences sont évidentes : le risque de conflit est sérieux, y compris par accident et/ou par provocation.

Un pont entre l’« ex-Ouest » et l’« ex-Est »

Pourtant, les réflexions sur l’Ukraine de la France et de l’Allemagne, à la fin des années 1990, n’ont pas perdu de leur actualité pour une solution politique du conflit, qui serait positive pour l’Ukraine et pour l’Europe. Le pays formerait un pont, au sein de cette nouvelle Europe, entre l’« ex-Ouest » et l’« ex-Est », basé sur une garantie de son intégrité territoriale de la part de la Russie, des Etats-Unis, de la Pologne, de la France et de l’Allemagne, sur une non-adhésion de l’Ukraine à l’Alliance atlantique, sur une orientation fédérale dans ses structures internes, sur un statut particulier à négocier pour la Crimée, sur une association à l’Union européenne et à la nouvelle organisation économique à l’Est, ainsi que sur une clause de révision après vingt-cinq ans.

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