Exercice des plus éprouvants pour Franck Riester, ministre délégué au Commerce extérieur. Ce dernier a présenté mardi 8 février les résultats du commerce extérieur français, qui sont catastrophiques. “Le déficit des échanges de biens se dégrade à nouveau, pour atteindre 84,7 milliards d’euros en 2021”, a-t-il attaqué. Le précédent record de 2011 – qui se montait à 75 milliards d’euros dans la foulée de la crise financière – a ainsi été enfoncé. Depuis le début du quinquennat le trou s’est creusé de 45% en France. Et pendant ce temps-là, comme l’indiquait le Haut-Commissaire au Plan François Bayrou, dans une note publiée début décembre, « le commerce extérieur allemand est excédentaire de plus de 200 milliards d’euros » en moyenne.
Franck Riester a beau expliquer que, dans ce contexte “l’Union européenne est notre meilleur rempart et notre meilleur relais de croissance”, il doit concéder immédiatement que le déficit commercial avec les 26 autres Etats membre atteint près de 57 milliards d’euros, dont 13 milliards d’euros avec l’Allemagne. Quant au Royaume Uni, il tire de toute évidence bénéfice du Brexit, avec une hausse de 26% des exportations vers l’Hexagone.
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« En ce qui concerne la balance des biens, la dégradation est essentiellement due à l’alourdissement de la facture énergétique de 17,9 milliards d’euros », insiste Franck Riester. L’effondrement simultanée des ventes d’Airbus n’a pas aidé non plus – en 2021, l’aéronautique n’était toujours qu’à la moitié de son niveau d’avant crise. Mais le déficit provient aussi de la quantité astronomique de de smartphones provenant essentiellement d’Asie (pour un montant de 5,4 milliards en rythme annuel, relevaient les douanes en novembre 2021) et de lave-vaisselle (pour 400 millions d’euros en novembre 2021 contre 338 millions d’euros en 2019). Ainsi que d’une glissade sans fin pour un secteur industriel historique en France : l’automobile tricolore a battu tous les records, avec un déficit de sa balance commerciale à quasiment 18 milliards d’euros, soit 15,4 milliards d’euros pour la production d’automobiles et 2,5 d’euros pour les équipements destinés aux véhicules.
Masques tricolores
Face à cette avalanche de mauvaises nouvelles, le ministre délégué au Commerce extérieur s’est toutefois essayé à un exercice de style en tentant d’extraire les données les plus favorables. Sur le front manufacturier, l’envahissement des tarmacs par les masques chinois a cessé: de 6 milliards d’euros importés en 2020, ce produit anti-Covid est passé à 800 millions d’euros en 2021. “C’est bien la preuve que lorsque l’on crée une filière industrielle en France, on est capable de baisser les importations sur ce secteur”, pointe Franck Riester.
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Quelques secteurs tirent également leur épingle du jeu. Les exports de vins et spiritueux, qui avaient été pris en otage du conflit Airbus – Boeing, ont grimpé de 33% vers les Etats-Unis dès la réouverture des frontières. Les produits chimiques, parfums et cosmétiques ont dépassé leur niveau de 2019, pour afficher un excédent de 15,2 milliards d’euros. Et le luxe reste une valeur sûre du made in France, avec un excédent de 32 milliards d’euros en hausse de 8% l’an passé.
Argument de campagne
Surtout, si le commerce des biens est largement à la peine, la France parvient toujours à placer ses services à l’étranger, qu’il s’agisse de finance et de conseil – ou encore à profiter des dépenses des touristes dans l’Hexagone. « Les services ont atteint un excédent record de 36,2 milliards d’euros », se félicite ainsi le ministre délégué au commerce extérieur.
Une bonne raison pour se concentrer sur le secteur tertiaire et reporter à demain les ardues politiques de réindustrialisation? Sur France Inter, ce 8 février, Bruno Le Maire jure qu’il n’en est pas question et en fait un argument de campagne: « L’acte 1 de la réindustrialisation a été le premier quinquennat d’Emmanuel Macron et je souhaite que l’acte 2 de la reconquête industrielle soit au cœur du deuxième quinquennat d’Emmanuel Macron que j’appelle de mes vœux ».
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