Publié le : 07/02/2022 – 14:02
Après de multiples appels au boycott, les deux-tiers du Parlement n’ont pu être atteints, lundi, pour élire le nouveau président irakien. Le report, qui vient plomber le calendrier politique, était attendu, dans un pays habitué aux tractations en coulisse orchestrées par les grands partis. Aucune date n’a encore été fixée pour organiser un nouveau scrutin.
L’Irak attendra encore avant de connaître le nom de leur prochain président : le scrutin prévu lundi 7 février a été reportée sine die, le quorum des deux-tiers n’ayant pas été atteint dans l’hémicycle à la suite de boycotts en cascade et la suspension d’un des favoris.
Officiellement, la séance était prévue à midi (09 h GMT). La réunion pour le vote a été transformée en une simple « séance de délibération », en présence de seulement 58 députés sur 329, selon le service médias du Parlement.
Respectant le boycott annoncé par leurs directions respectives, les élus des plus importants partis irakiens ont observé la politique de la chaise vide.
En conséquence, a confirmé à l’AFP un responsable sous le couvert de l’anonymat, « il n’y aura pas de vote pour élire le président en raison d’un défaut de quorum » des deux-tiers.
Le report, qui vient plomber le calendrier politique irakien, était attendu, dans un Irak habitué aux tractations en coulisse orchestrées par les grands partis.
Aucune date n’a encore été fixée pour organiser un nouveau scrutin.
Afin de se donner plus de temps pour se mettre d’accord sur un candidat, le courant de l’influent religieux chiite Moqtada Sadr, la Coalition de la souveraineté du président du Parlement Mohamed al-Halboussi, ainsi que le Parti démocratique du Kurdistan (PDK), représentant à eux trois 155 députés, avaient tour à tour annoncé leur boycott depuis samedi.
Dans le camp politique adverse, le Cadre de coordination, rassemblant des partis chiites pro-Iran, avait lui aussi fait part de son intention de ne pas participer au vote.
Depuis les législatives d’octobre remportées par Moqtada Sadr, l’échiquier politique reste plus que jamais polarisé. Après quatre mois de querelles, les barons irakiens n’ont toujours pas réussi à former une coalition parlementaire majoritaire, cruciale pour désigner par la suite un nouveau Premier ministre.
Lundi, les quelques rares députés présents dans un hémicycle largement vide ont finalement délibéré sur des points de routine.
Soupçons de corruption
Depuis les premières élections multipartites de 2005, le poste largement honorifique de président de la République est tacitement réservé à un Kurde.
Cette année, quelque 25 candidats sont en lice, mais deux politiciens chevronnés se distinguaient : Hoshyar Zebari, un ex-ministre issu du PDK, et le président sortant Barham Saleh, du parti rival de l’UPK, l’Union patriotique du Kurdistan.
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Or la candidature de Hoshyar Zebari a été « temporairement » suspendue dimanche par la justice, après une plainte présentée par des députés se basant sur d’anciennes accusations de corruption.
Les plaignants estiment que Hoshyar Zebari ne remplit pas les conditions requises par la Constitution, citant notamment son limogeage, en 2016, par le Parlement lorsqu’il était ministre des Finances, « en raison d’accusations liées à des faits de corruption financière et administrative ».
La plainte évoque aussi au moins deux autres affaires judiciaires l’impliquant, notamment pour « abus de pouvoir » en lien avec « des sommes importantes dépensées concernant un bâtiment qui n’appartient pas à l’État ».
« La justice irakienne ne m’a jamais condamné », a rappelé Hoshyar Zebari lors d’une interview télévisée vendredi.
« Se partager le gâteau »
Dans les 15 jours suivant son élection, le président doit désigner un Premier ministre, choisi par la plus large coalition au Parlement.
Une fois désigné, le Premier ministre, traditionnellement chiite, a un mois pour former un gouvernement. Mais la suite du processus s’annonce houleuse.
En s’alliant avec le PDK et la formation sunnite du chef du Parlement Mohamed al-Halboussi, Moqtada Sadr affirme pouvoir former un « gouvernement de majorité nationale ».
Il romprait ainsi avec la tradition du consensus qui permet à tous les grands partis de se partager le pouvoir, et chercherait à marginaliser ses rivaux.
Mais c’est sans compter avec l’Alliance de la Conquête, vitrine politique des anciens paramilitaires pro-Iran du Hachd al-Chaabi, et le Cadre de coordination. Ils comptent sur le jeu des alliances pour aligner eux aussi une majorité.
« Personne ne sait être dans l’opposition, tout le monde sait comment se partager le gâteau », remarque auprès de l’AFP le politologue irakien Hamzeh Hadad, voyant se profiler une « coalition élargie ».
Les négociations politiques autour du poste de Premier ministre ont été accompagnées de violences.
Fin janvier, trois roquettes sont tombées près de la maison du président du Parlement, Mohammed al-Halboussi. En novembre, le Premier ministre, Moustafa al-Kazimi, a échappé à une tentative d’assassinat.
Avec AFP
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