D’après le ministre turc de l’Intérieur, des garde-côtes grecs auraient jeté à l’eau trois migrants qui venaient d’entrer illégalement sur l’île de Chios. Deux d’entre eux ont réussi à rejoindre la Turquie à la nage avant d’être pris en charge, le dernier est porté disparu. Une enquête a été ouverte par le parquet de Cesme, en Turquie.
Un groupe de 21 migrants est arrivé à l’aube dimanche 30 janvier sur l’île grecque de Chios, après avoir traversé la mer Égée, depuis la Turquie, selon les données de l’ONG Aegean boat report (ABR). Les exilés se sont séparés pour éviter d’être repérés par les forces de l’ordre et renvoyés côté turc. En vain.
L’île grecque de Chios se trouve à quelques kilomètres de la Turquie. Crédit : Google maps
Douze personnes ont été interceptées et remises à l’eau sur un canot par les Grecs, puis secourues quelques heures plus tard par les Turcs alors qu’ils dérivaient près de Cesme, en Turquie, à une dizaine de km des côtes grecques. Six autres migrants ont également été arrêtés par la police, indique encore l’association sans préciser leur sort. Les trois derniers exilés du groupe auraient quant à eux été jetés à l’eau dans la nuit de dimanche à lundi.
« Ses derniers mots ont été : ‘Je ne sais pas nager’ »
« Avant de nous mettre dans l’eau, les garde-côtes grecs nous ont donné des gilets de sauvetage mais ils étaient trop petits car destinés à des enfants », explique en arabe un des migrants, interrogé par les autorités turques. La vidéo a été diffusée sur le compte Twitter du ministre de l’Intérieur, Süleyman Soylu.
D’après un communiqué des garde-côtes turcs, deux d’entre eux ont nagé jusqu’à la terre ferme par leurs propres moyens, avant d’être pris en charge par la police. Un autre est porté disparu. Des recherches ont été menées lundi pour retrouver cette personne, en vain.
« Il a dit qu’il ne savait pas nager, mais ils [les garde-côtes grecs, ndlr] ne l’ont pas écouté [… ) Ses derniers mots ont été : ‘Je ne sais pas nager, je ne sais pas comment faire’ », précise le jeune homme dans la vidéo.
Une enquête a été ouverte par le parquet de Cesme, signale le communiqué. Le ministre de l’Intérieur turc a regretté l’absence de réaction de l’Union européenne, « apôtre de la liberté et des droits de l’Homme ».
Plus de 600 refoulements en 2021
Ces informations, délivrées par Ankara, n’ont pas été confirmées par Athènes. Contactées par InfoMigrants, les autorités grecques n’ont pour l’heure pas répondu à nos sollicitations.
Les relations entre la Turquie et la Grèce, et plus largement l’Union européenne, sont tendues depuis plusieurs années. Le pouvoir turc utilise régulièrement la question migratoire pour critiquer les États membres. L’information relative à la remise à l’eau des trois migrants est donc à prendre avec précaution.
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Les Grecs ne sont pas non plus exempts de tout reproches. Les récits d’exilés sur des refoulements en mer Égée ont été maintes fois documentées par des ONG et par les médias dont InfoMigrants. Un Guinéen avait raconté fin 2020 à la rédaction comment des hommes en uniforme avaient percé le canot dans lequel il se trouvait pour l’empêcher d’atteindre les îles. Plus récemment, une Congolaise avait expliqué comment les garde-côtes grecs avaient refoulé son embarcation en mer, mettant les passagers en danger. « Ils nous ont menacé avec leur armes (…) Ils ont tourné autour de nous, ce qui a fait de grandes vagues et du courant », avait-elle rapporté.
L’ONG Aegean boat report, qui a recensé 629 cas de « pushback » en mer Égée en 2021, affirme que plusieurs témoignages font état de migrants jetés à l’eau par les autorités grecques, certains « menottés avec des bandes de plastique ».
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