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L’ONU accusée de manque de « vigilance » dans le choix de ses prestataires en Syrie

Un emploté du PNUD lors d’une opération de rénovation à Homs, en 2016. LOUAI BESHARA / AFP

Entre 2015 et 2017, les sociétés de Tarif Al-Akhras, un parent de l’épouse de Bachar Al-Assad, ont bénéficié de contrats des Nations unies à hauteur de 275 000 dollars (240 000 euros) alors que depuis 2011, l’homme d’affaires est sous le coup de sanctions de l’Union européenne pour « soutien logistique au régime » syrien. Entre 2015 et 2020, des compagnies de sécurité privée aux accointances douteuses, dont Al-Shorouk, qui serait affiliée à Maher Al-Assad, frère du président et commandant d’une unité d’élite, ont compté parmi les prestataires de services des équipes onusiennes en Syrie. C’est ce qu’affirment Human Rights Watch (HRW) et l’ONG Syrian Legal Development Programme (SLDP), qui pointent d’autres contrats suspects.

Dans un rapport publié fin janvier, les deux organisations appellent l’ONU a se doter de garde-fous plus solides dans le processus d’octroi de ses contrats en Syrie. « Les principes des droits humains ne sont pas assez intégrés par les Nations unies dans le choix de leurs partenaires pour la mise en œuvre de l’aide humanitaire », dénonce Sara Kayyali, chercheuse sur la Syrie pour HRW. Avec le risque que « des entités abusives » se retrouvent financées par les Nations unies.

La Syrie est entrée dans une phase « grise », caractérisée par l’arrêt de l’essentiel des combats, sans qu’aucun des facteurs déclencheurs de la guerre n’ait été traité, une période de post-conflit sans amorce de règlement du conflit. Le marasme économique en cours – un produit de la guerre, que les sanctions occidentales et la corruption et l’incurie gouvernementale ont aggravé – rend la population dépendante de l’aide internationale. Cette manne aiguise les appétits, à commencer par celui du pouvoir, dont les caisses sont vides.

Une nouvelle classe de profiteurs

Certes, le mot d’ordre imposé par les grandes capitales occidentales – pas de reconstruction sans transition politique – reste en vigueur. Mais les budgets humanitaires dévolus à la Syrie demeurent importants. Et la Russie est parvenue à faire entrer le terme d’« early recovery » (relèvement rapide) dans une résolution de l’ONU, en 2021 : son but est que l’aide humanitaire aille à des projets de redressement, plus proches de la reconstruction que de l’urgence.

Parallèlement, à côté des entrepreneurs liés de longue date au pouvoir, la guerre a fait émerger une nouvelle classe de profiteurs, composée notamment d’ex-chefs de milices pro-Assad, qui usent de faux nez pour se lancer dans les affaires.

Tous ces éléments poussent les deux ONG à réclamer davantage de vigilance. « C’est une évidence : l’aide va s’accroître en Syrie. Nous ne disons pas qu’il faut la supprimer. Mais elle ne doit pas bénéficier à des gens qui ont commis d’atroces violations des droits humains », plaide Sara Kayyali. Selon elle, l’un des principaux écueils des Nations unies, poids lourd de l’humanitaire en Syrie, est de ne pas faire de ces violations un critère rédhibitoire dans l’attribution des contrats. « Ça fonctionne au cas par cas, selon les exigences des bailleurs de fonds. Or, on risque de se retrouver avec de plus en plus de pays donateurs indifférents à cette question. » Une référence à la Russie, mais aussi à des pays européens favorables à un rapprochement avec Damas. Même si le processus de normalisation est lent, le régime s’est déjà vu rouvrir des portes par certains de ses pairs arabes.

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