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A Kiev, les Ukrainiens redécouvrent leurs abris anti-bombes

Un abri anti-bombes réhabilité en 2018, situé dans le bâtiment municipal du quartier dortoir de Dniprovski, à Kiev, le 2 février 2022. GUILLAUME HERBAUT POUR « LE MONDE »

A Kiev, le café Cupidon est bien connu de l’intelligentsia ukrainienne. Ecrivains, artistes, musiciens et amateurs de littérature se pressent depuis vingt-sept ans dans cette salle au décor bohème, installée au sous-sol d’un immeuble stalinien. On y vient pour boire un verre en profitant des expositions, des lectures, des concerts et des matchs de foot.

Il y a deux mois, la gérante de l’établissement, Albina Kotiuk, a découvert avec stupéfaction qu’il s’agissait aussi d’un abri anti-bombes. Le lieu fait partie des 4 500 structures de ce type, héritées de la guerre froide. La mairie les répertorie depuis décembre 2021 en vue d’une nouvelle offensive potentielle de la Russie, dont 100 000 hommes sont massés aux frontières. « J’étais surprise, mais après tout, l’endroit s’y prête bien », affirme la jeune femme en observant la salle aux allures de grotte.

Depuis deux semaines, la clientèle se fait plus rare. Les déclarations alarmantes des Etats-Unis et du Royaume-Uni sur l’imminence d’une attaque ont fini par avoir raison de la relative indifférence qui régnait à Kiev jusqu’ici. « Il y a une vraie angoisse, explique Albina Kotiuk. Dans mon entourage, des amis viennent de faire des entraînements militaires. Moi, j’essaye de ne pas trop y penser. » Elle a tout de même regardé la carte officielle montrant l’emplacement des abris, publiée sur Internet par les autorités locales et partagée massivement sur les réseaux sociaux. « Depuis que j’ai appris que le métro est aussi un immense abri, je vois la ville différemment », ajoute la gérante, qui se dit « prête à aller combattre » en cas d’offensive.

Albina Kotiuk, 19 ans, gérante du restaurant Cupidon. L’établissement est référencé en abri, en cas de bombardement sur la ville, à Kiev, le 2 février 2022. GUILLAUME HERBAUT POUR « LE MONDE »

« La population dans un état d’alerte extrême »

Attablée avec ses amis, Alex, 30 ans, fait partie des habituées du café Cupidon. Sous son air tranquille, cette programmeuse informatique confie, elle aussi, être devenue « anxieuse en permanence ». « C’est comme une bombe à retardement. On ne sait pas quand ça va exploser, ni si ce sera le cas, mais au cas où, tout le monde réfléchit à ce qu’il compte faire : s’enfuir, combattre ou rester ici. » Elle hésite encore entre aller au front ou aider à l’arrière. « Ce qui est très troublant, en ce moment, c’est que tout le monde parle de la guerre, mais qu’on ne la voit pas, ici. Chacun vaque à ses occupations comme d’habitude. Parfois, je me demande : “Est-ce que tout ça est une illusion ? Suis-je la seule à être angoissée ? »

Olexandra Tsekhanovska, 30 ans, experte en sécurité de l’information avec une partie de son kit d’urgence en cas d’attaque russe, à Kiev, le 2 février 2022. GUILLAUME HERBAUT POUR « LE MONDE »

Cette impression est pourtant largement partagée dans la capitale, où des publicités sont apparues sur les murs pour appeler la population à s’engager dans la défense civile.

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