Malgré les différences d’alphabets et les subtilités de chaque langue, des développeurs des quatre coins du monde se sont lancé le défi de traduire et adapter Wordle, jeu en ligne américain au succès planétaire, racheté lundi par le New York Times.
Cinq lettres, six essais, et un seul mot à découvrir par jour: la formule de « Wordle » est simplissime, mais elle a rendu accros des joueurs du monde entier, jusqu’à attirer l’attention du célèbre journal américain qui a fait son acquisition pour plusieurs millions de dollars.
De l’Allemagne au Pakistan, développeurs web et passionnés de linguistique se sont donc lancés dans une course à la traduction du jeu, espérant être les premiers à créer une version dans leur propre langue.
« C’est devenu une tendance sur les réseaux sociaux, qui a permis de mettre en avant la créativité de petits développeurs voulant chacun faire leur traduction », s’amuse Louan Bengmah, 21 ans.
Le jeune homme de 21 ans s’est attaqué à l’adaptation de Wordle en français, recevant l’aide d’autres développeurs sur la plateforme de streaming Twitch, et a réussi à publier sa version au terme d’un week-end.
« On a eu pas mal de débats sur les mots à choisir, et on s’est finalement mis d’accord pour prendre ceux de l’ODS, le dictionnaire de Scrabble », raconte Louan Bengmah, qui n’a tiré aucun profit de sa version gratuite.
Dans les pays qui n’utilisent pas l’alphabet latin, la transposition de Wordle avec d’autres caractères, tout en conservant le principe du mot à cinq lettres, s’est toutefois révélée particulièrement complexe.
Pour y remédier, un professeur de linguistique de Hong Kong, Lau Chaak-ming, a mis au point une version en cantonais appelée « Zidou », grâce à la méthode de romanisation des caractères du « Jyutping » créée en 1993.
« Nous aurions déjà été ravis que quelques centaines de personnes jouent à notre version, mais je n’en suis pas revenu quand plus de 10.000, puis de 100.000 personnes ont commencé à l’utiliser », s’est-il réjoui.
– Défi linguistique –
La fièvre Wordle s’est aussi emparée du mathématicien et développeur israélien Amir Livne Bar-on, qui a très vite été frustré de ne pas être bon joueur en anglais.
« Comme ce n’est pas ma langue maternelle, j’ai voulu créer un jeu similaire en hébreu pour pouvoir vraiment en profiter », raconte-t-il.
En travaillant sur sa version baptisée « Meduyeket », il s’est aussi heurté à quelques barrières linguistiques: « les mots en hébreu sont plus compacts, avec beaucoup moins de doubles lettres et de voyelles », détaille-t-il.
Une fois mise en ligne, elle a récolté un grand succès auprès des jeunes Israéliens. « Des gens m’ont dit que le jeu avait égayé leur quarantaine pendant la vague du variant Covid Omicron, et rien n’aurait pu me rendre plus heureux », s’est-il réjoui.
Wayne McDougall, pour sa part, a relevé un défi encore plus redoutable: le Néo-Zélandais s’est lancé dans la création d’une version en langue Maori, Te Reo… qu’il ne parle pas lui-même.
« Comme personne ne l’avait encore fait, je me suis dit qu’il fallait bien que quelqu’un s’y mette », plaisante McDougall, qui élaboré, non sans peine, une liste de mots avec leurs définitions.
« La plus grande difficulté est que l’alphabet Te Reo possède un nombre limité de consonnes et de voyelles », détaille le développeur, qui n’a pas baissé les bras et est allé au bout de sa version.
« J’avais peur d’empiéter sur le territoire des autres, la langue étant en quelque sorte un trésor culturel, mais tous les retours ont été positifs, et les locuteurs natifs m’ont fourni des ressources et des mots supplémentaires à inclure. »
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