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Dans le sud dde l’Algérie, la pandémie de Covid-19 encourage un tourisme local

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Dans les rues du ksar Tafilelt, près de Ghardaïa, à quelque 600 kilomètres au sud d’Alger, en novembre 2017. RYAD KRAMDI / AFP

Sur la place du souk, le marché de Ghardaïa, les négociations vont bon train pour l’acquisition de produits locaux, en particulier les tapis en laine faits à la main par les femmes de la région. Les touristes, qui viennent d’Alger, d’Oran ou encore d’Annaba, portent déjà le chèche, long foulard typique des régions du sud, pour se protéger du soleil.

Ils ont fait plusieurs heures de route ou pris l’un des vols affrétés par la compagnie nationale Air Algérie pour se rendre dans cette ville du nord du Sahara connue pour ses palmeraies et ses cinq ksour, ces citées fortifiées où vit la communauté berbérophone des Mozabites.

« Habituellement, nous allons en Europe, mais c’était trop cher et contraignant à cause du nombre limité de vols et du Covid », explique Lina, une enseignante de la banlieue algéroise. Elle et son mari sont venus passer leurs vacances à Ghardaïa, dans la vallée du Mzab, à 600 kilomètres au sud d’Alger.

« Ici, la saison touristique débute au mois d’octobre et se termine vers avril », précise Anas, un habitant. Durant la saison haute, ce diplômé en architecture de 26 ans devient guide touristique pour les « nordistes » à qui il fait découvrir cette région classée au patrimoine mondial par l’Unesco depuis 1982. Preuve du succès qu’il rencontre, son téléphone ne cesse de sonner. Au bout du fil, des agences de voyage du nord le chargent de trouver un hébergement de dernière minute pour des voyageurs désespérés.

« L’aventure »

En Algérie, où la relance – régulièrement annoncée – du secteur touristique s’apparente à un vœu pieux, plus de deux millions de ressortissants ont l’habitude de se rendre chaque année en Tunisie pour y passer des vacances. Mais, depuis la crise sanitaire, la frontière terrestre avec le voisin de l’est – par laquelle transitait 90 % du flux touristique – est fermée. Elle a été partiellement rouverte le 5 janvier mais seulement pour les résidents. L’Europe et la Turquie, deux autres destinations prisées, sont également devenues plus difficilement accessibles.

Alors, comme Lina et son mari, de nombreux Algériens de la classe moyenne se sont tournés vers l’offre locale, dans le désert du sud, mais aussi dans les montagnes de l’est du pays. Non sans créer quelques difficultés, car si certains ont organisé eux-mêmes leur séjour, d’autres sont passés par des agences pas toujours en règle.

La baisse d’activité due au Covid-19 a conduit à la fermeture temporaire ou définitive d’agences de voyage ayant pignon sur rue, ce qui a profité « à certaines organisations parasitaires », déplore Saïd Boukhelifa, président du Syndicat national des agences de tourisme (SNAT). « Certaines se débrouillent pas trop mal mais, pour la majorité, c’est l’aventure : elles louent un autocar, prennent un accompagnateur et se dirigent vers Tikjda et le Djurdjura [région montagneuse du nord-est du pays] ou vers le sud, notamment à Taghit », explique-t-il.

Cette petite oasis de la région de Béchar (sud-ouest) – qui ne devrait pas recevoir plus de 1 000 touristes à la fois, selon M. Boukhelifa – est régulièrement au centre de polémiques à cause de la dégradation de gravures rupestres millénaires et de la pollution des lieux dues à l’afflux d’estivants.

Dépassé par l’affluence de visiteurs

Durant le réveillon 2022, des milliers de personnes ont convergé vers la grande dune de Taghit, site majestueux qui surplombe la palmeraie, tiré des feux d’artifices et laissé leurs déchets dans le sable. « Cela fait trois années consécutives que l’on assiste à un massacre écologique. L’Etat doit réglementer l’accès à ces sites », dénonce le président du SNAT.

La ville de Ghardaïa, où les coutumes et modes de vie sont préservés depuis des siècles, n’a pas connu ce problème. Les visites dans les cinq cités fortifiées y sont étroitement réglementées. A l’entrée de chacune d’entre elles, un bureau associatif géré par des habitants forme de petits groupes de touristes et leur met à disposition un membre de la communauté mozabite chargé de les diriger dans les ruelles étroites.

Même encadrement strict à l’intérieur de la vieille ville où il est interdit de fumer et de photographier les habitants sans leur autorisation, notamment les femmes qui apparaissent furtivement drapées de leur haïk, un long tissu blanc en laine qui laisse entrevoir un seul œil.

Mais durant ces vacances de fin d’année, les associations locales ont rapidement été dépassées par l’affluence de visiteurs, explique Anas. « C’était du jamais vu. Elles ont été obligées de former des groupes de plus de vingt personnes, ce qui est inhabituel pour les lieux. Après deux ans de vide à cause du Covid, ça fait du bien de voir Ghardaïa animée et c’est bon pour l’économie locale », se réjouit le jeune homme.

A l’échelle du pays, cet afflux de touristes nationaux est toutefois « très relatif », tient à nuancer Saïd Boukhelifa. Si les capacités hôtelières ont connu une augmentation en milieu urbain, elles restent très limitées dans les zones où le tourisme est saisonnier, avec « moins de 2 000 lits en montagne et 8 000 lits dans le sud », précise-t-il. Pas de quoi accueillir convenablement l’ensemble des nationaux ni les touristes étrangers, seulement « 5 000 à visiter annuellement le pays », regrette cet ancien cadre de l’Office national algérien du tourisme (ONAT).

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