Publié le : 28/01/2022 – 16:22Modifié le : 28/01/2022 – 16:25
Des chercheurs australiens ont annoncé, mercredi, avoir observé un flash d’onde radio qui se répétait toutes les 18,18 minutes aux confins de notre galaxie. C’est du jamais-vu, et les experts se demandent quelle pourrait en être la cause.
Il apparaissait toutes les 18,18 minutes (soit 18 minutes et 16 secondes). C’était un flash d’onde radio très intense qui se répétait à un endroit précis de la Voie lactée et qui, aujourd’hui, « intrigue les astronomes », assure Natasha Hurley-Walker, une astrophysicienne de l’université de Curtin, membre de l’équipe de chercheurs qui l’a découvert.
Leurs observations, publiées mercredi 26 janvier dans la revue scientifique Nature, ont rapidement suscité une vague d’articles sur ce nouveau « mystère spatial » incarné par un signal lumineux d’origine inconnue, visible avec la ponctualité d’un coucou suisse pendant trois mois en 2018 avant de disparaître complètement.
Sur la piste d’étoiles massives qui ont explosé
Ces flashes radio ont été émis par un objet spatial encore non identifié, baptisé GLEAM-X J162759.5-523504 et situé à 4 000 années-lumière de la Terre. Lorsqu’il s’allumait toutes les 18,18 minutes, il était tout simplement le point « le plus lumineux visible depuis la Terre », assurent les auteurs de l’étude. Plus encore que « les émissions radio des trous noirs supermassifs qui sont pourtant ce qu’on connaît de plus lumineux dans ce spectre d’ondes », assure Natasha Hurley-Walker. Une caractéristique déjà suffisamment intrigante en elle-même.
Mais il y avait un mystère apparemment bien plus grand encore, qui a trait à la cadence avec laquelle GLEAM-X J162759.5-523504 « s’allumait ». Il n’est certes pas le seul objet spatial à envoyer des flashes d’ondes radio à intervalle régulier. C’est même l’une des marques de fabrique des pulsars ou étoiles à neutrons, qui sont ce qui reste « après l’explosion d’une grosse étoile d’environ huit à dix fois la taille de notre Soleil », explique Ismaël Cognard, astrophysicien au Laboratoire de physique et chimie de l’environnement et de l’espace à Orléans et spécialiste des pulsars, contacté par France 24.
Une fois formés, ces pulsars se mettent à tourner sur eux-mêmes ; d’abord très vite, puis progressivement plus lentement (sur des périodes de plusieurs millions d’années). Leurs pôles émettent ces fameux flashes d’ondes radio, qui peuvent être captés par des télescopes lorsqu’ils entrent dans leur champ de vision. D’où l’impression qu’ils s’allument et s’éteignent.
Mais aucun des 3 000 pulsars actuellement identifiés ne fait sa révolution en 18,18 minutes… « Généralement, ils tournent beaucoup plus vite, aux alentours d’une seconde. Le plus lent jamais observé à ce jour prend 23 secondes pour faire sa rotation », précise Ismaël Cognard.
GLEAM-X J162759.5-523504 ne peut pas non plus être le vilain petit pulsar qui n’en ferait qu’à sa tête. « Quand ces étoiles à neutrons tournent trop lentement, elles n’ont plus l’énergie pour émettre leurs flashes radio et s’éteignent complètement », assure cet astrophysicien.
Une énergie dégagée comparable à 1010 bombes Hiroshima
« En réalisant qu’on n’avait encore jamais vu rien de tel, j’ai eu des sueurs froides. Après tout, il y a justement une vaste communauté qui cherche exactement ça : des signaux radio spatiaux qui se répètent et pourraient être le signe de la présence d’une vie extraterrestre », écrit Natasha Hurley-Walker. En d’autres termes, la Terre aurait-elle manqué sa rencontre du troisième type en 2018 ?
Tout indique cependant que ces émissions sont d’origine naturelle. « L’énergie dégagée toutes les 18 minutes par ces flashes correspond à celle envoyée par le soleil sur Terre durant 100 jours ou encore équivaut à celle de 1010 explosions de bombes Hiroshima. Je ne m’imagine pas une civilisation, aussi évoluée soit-elle, capable de faire ça », souligne Diego Gotz, astrophysicien au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), contacté par France 24.
Les pulsars ou, potentiellement, les petits bonhommes verts ne sont cependant pas les seuls à pouvoir émettre des signaux radio. « Le responsable le plus probable est le magnétar », assure Ismaël Cognard. Lorsqu’une étoile massive explose, elle n’est pas condamnée à devenir un pulsar. Elle peut aussi se transformer en magnétar, qui est une autre forme d’étoile à neutrons. « La grande différence, c’est que le champ magnétique qui les entoure est 100 à 1 000 fois plus intense que celui des pulsars », précise Diego Gotz.
Une caractéristique cruciale : elle permet au magnétar de continuer à émettre des flashes radio bien plus longtemps « en puisant son énergie dans ce champ magnétique que le pulsar n’a pas », explique l’expert du CEA.
Reste que jusqu’à présent « la rotation la plus longue jamais observée pour un magnétar dépassait de peu une minute », souligne Ismaël Cognard. La plupart clignotent toutes les 2 à 12 secondes. Mais, pour lui, c’est théoriquement tout à fait possible.
GLEAM-X J162759.5-523504 serait simplement le plus vieux des magnétars jamais observé. Sa rotation de 18,18 minutes suggère qu’il a « à peu près l’âge de notre galaxie », conclut Diego Gotz.
La piste du magnétar très âgé est également celle privilégiée par les chercheurs australiens qui ont découvert cet étrange phénomène. Mais « il peut aussi s’agir d’un type d‘objet spatial qu’on n’a encore jamais observé, tout simplement parce qu’on n’a pas encore cherché des signaux radio qui se répètent sur des périodes aussi longues », note Natasha Hurley-Walker. Auquel cas, ce ne serait que le début de l’aventure.
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