La vidéo choc débute par une première explosion. A des dizaines de mètres de hauteur, un drone largue une deuxième bombe, puis une troisième. La caméra embarquée filme l’attaque aérienne. Un baraquement s’embrase au milieu d’une forêt de l’Etat du Michoacan, dans l’ouest du Mexique. Des hommes échappent in extremis aux flammes dans la panique. La caméra virevolte, puis s’écrase. Au sol, la riposte a abattu le drone bombardier permettant de récupérer les images attribuées au puissant et ultraviolent Cartel de Jalisco Nueva Generacion (CJNG).
Ce 10 janvier, l’assaut visait un groupe d’autodéfense, composé d’habitants de la région ayant pris les armes contre le CJNG face à l’inaction des autorités. Depuis, la vidéo de plus de deux minutes tourne en boucle dans les médias mexicains et sur les réseaux sociaux, révélant la course à l’innovation guerrière des cartels de la drogue en lutte entre eux et contre le gouvernement.
Le même jour, un autre drone du CJNG a attaqué un village voisin. Six autres raids similaires ont été comptabilisés, en 2021, dans le Michoacan. « Le CJNG y mène une guerre de conquête contre des cartels locaux qui ont infiltré les groupes d’autodéfense, complexifiant le conflit mafieux », explique Romain Le Cour Grandmaison, responsable du programme sécurité du think tank mexicain Mexico Evalua. « Le CJNG, comme ses rivaux, recourt à des drones pour mener des attaques à distance, précise ce spécialiste de la région. Les appareils, achetés bon marché, sont modifiés pour larguer des charges explosives artisanales, scotchées à des verres en plastique pour ralentir et stabiliser leur chute. Les assaillants filment eux-mêmes leurs attaques en guise de propagande pour terroriser leurs adversaires et les populations de cette zone stratégique du trafic de drogue. »
Lancement de programmes sociaux
Le climat chaud et tempéré du Michoacan sied à la culture de la marijuana. Son port, Lazaro Cardenas, sur la côte Pacifique, réceptionne, en provenance d’Asie, les précurseurs à la base des drogues synthétiques qui font la fortune du CJNG, l’une des deux organisations mafieuses les plus importantes du pays. La tête de son chef, Nemesio Oseguera Cervantes, alias El Mencho, est mise à prix 10 millions de dollars (8,8 millions d’euros) par l’agence antidrogue américaine (DEA).
C’est dans le Michoacan qu’en 2006 le président d’alors, Felipe Calderon (2006-2012), a lancé sa guerre contre le narcotrafic, déployant des dizaines de milliers de militaires sur le territoire. Son successeur, Enrique Peña Nieto (2012-2018), a poursuivi la même stratégie.
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