La tendance est récente mais elle se confirme d’année en année au Brésil, et devrait être particulièrement fertile en 2022 : la politisation des jeux vidéo. Deux phénomènes se complètent, s’emmêlent et se répondent. Le premier consiste à créer des jeux en se moquant des personnages politiques, de leurs mimiques et de leurs discours, à l’image du jeu payant Kandidatos, téléchargé 170 000 fois ces derniers mois dans le pays, selon son créateur. S’y s’affrontent sur un plateau de débat télévisé ou devant le Congrès brésilien douze personnalités politiques, dont « Bolsonaryo », (Jair Bolsonaro), l’actuel président, et « Lulo », Luiz Inacio Lula da Silva, son très probable adversaire à gauche.
Le jeu est agrémenté de citations de ces personnalités, toutes bien connues du public comme ce « canalhas ! » (« crapules » ), que Bolsonaro aime tant répéter pour décrire ses concurrents. Gabriel Nunes, le créateur de Kandidatos, a choisi la politique comme terrain de jeu car, dit-il, « c’est clairement le thème du moment au Brésil. On adore se moquer, faire des “mèmes” de tout, même du pire comme pendant la pandémie ». Pour ne pas être accusé de préférer un politique à un autre, Nunes a pris soin de donner à tous les mêmes facultés : « J’ai voulu amuser les gens sans arrière-pensée politique et ça a très bien marché. »
Propagande d’extrême droite
Si Gabriel Nunes se défend ainsi de toute implication politique, c’est qu’il n’ignore pas qu’il existe dans les jeux brésiliens un second courant, bien plus tendancieux, qui consiste à les développer dans un objectif clairement idéologique. Et dans ce groupe, de l’avis de tous les spécialistes, l’idéologie d’extrême droite, représentée par Jair Bolsonaro, a une vraie longueur d’avance sur ses adversaires de gauche. Lors de la dernière campagne présidentielle, en 2018, on a ainsi vu apparaître Bolsonaro Terror do PT (« Bolsonaro, la terreur du Parti des travailleurs »), un jeu dans lequel le président poursuit des militants du parti de l’ancien président Lula en train de voler de l’argent, référence directe aux supposés scandales de corruption qui ont anéanti la gauche à cette époque. Dans une autre production, Lula Escape da Prisão (« Lula s’échappe de prison »), le joueur incarne cette fois l’ancien président qui doit s’échapper du complexe pénitentiaire dans lequel il a été enfermé plus d’un an.
La justice a même parfois été forcée d’intervenir, comme dans le cas de Bolsonaro 2K18, jeu interdit car il mettait en scène le président frappant ceux qu’il promettait de combattre : les féministes, les LGBT ou les paysans sans-terre. « Le jeu entretenait les pulsions violentes des partisans du président », explique Marx Walker, rédacteur en chef de Observatorio de Games (« observatoire des jeux »), un portail spécialisé. Pour Thiago Falcao, professeur en communication et culture contemporaine de l’Université fédérale du Maranhao (UFMA), le succès rencontré par Bolsomito 2K18 n’a pas été une surprise :
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