Leurs très nombreux supporteurs et les médias régionaux les avaient baptisés les « Colston Four ». Les quatre jeunes militants antiracistes Rhian Graham, Milo Ponsford, Jake Skuse et Sage Willoughby ont tous été acquittés mercredi 5 janvier, à l’issue d’un procès de plusieurs mois à la Cour royale de Bristol, avec jury populaire. Ils avaient été inculpés fin 2020 pour « dommages criminels » dans le cadre du déboulonnage de la statue de l’esclavagiste Edward Colston, protecteur très contesté de cette grosse ville du sud-est de l’Angleterre, principale bénéficiaire du commerce triangulaire entre l’Afrique, l’Angleterre et ses colonies caribéennes au XVIIIe siècle.
Erigée à la fin du XIXe siècle au cœur de Bristol, la statue d’Edward Colston (1636-1721), a été arrachée de son piédestal le 7 juin 2020, à la fin d’une manifestation en hommage à George Floyd, l’Afro-Américain tué par un policier à Minneapolis (Minnesota) en mai 2020, puis traînée jusqu’au port tout proche, et jetée dans les eaux de l’Avon. La très droitière ministre de l’intérieur, Priti Patel, avait estimé que les auteurs du déboulonnage devaient être poursuivis en justice, considérant comme « absolument honteuse » la mise à bas du Bristolien.
L’évènement, vécu en direct par des milliers de personnes, avait fait le tour du monde et lancé un mouvement de contestation des symboles dans l’espace public d’une histoire coloniale jusqu’alors écrite par les élites blanches. Depuis, une vingtaine de statues de personnages historiques liés au commerce triangulaire ont été escamotées – sur l’ordre de collectivités locales ou d’universités – au Royaume-Uni, dont celles des marchands d’esclaves Robert Milligan et Sir John Cass, à Londres.
Une commission historique indépendante
Le gouvernement Johnson a haussé le ton, quand la massive statue de Winston Churchill, qui fait face au Palais de Westminster sur Parliament Square, a été attaquée à son tour – fin juin 2020, des manifestants ont tagué « was a racist » (« était un raciste ») sur son piédestal. S’en prendre à l’ex-premier ministre, une icône nationale, héros de la deuxième guerre mondiale, est « honteux et absurde », avait alors réagi Boris Johnson, auteur d’une biographie de son illustre prédécesseur.
L’héritage de Colston était contesté à bas bruit depuis au moins une vingtaine d’années par des militants et historiens de Bristol, qui réclamaient sinon la mise au rebut de sa statue, au moins la pose d’une nouvelle plaque rappelant son passé. Celle fixée sur son piédestal depuis plus d’un siècle célébrait « l’un des plus vertueux et sages fils de cette cité ». Issu d’une très ancienne famille de la bourgeoisie locale, Edward Colston devint en 1680 l’un des membres de la Royal African Company (RAC), détenant le monopole du lucratif transport d’esclaves africains vers les colonies britanniques des Antilles. Du temps de Colston, la RAC a fait traverser l’Atlantique à plus de 80 000 Africains – hommes, femmes et enfants. Environ 19 000 sont morts durant les traversées, sans compter les dizaines de milliers d’autres victimes dans les Caraïbes.
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