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Françoise Hollman: de “l’esprit Canal +” aux voix multilingues de France Médias Monde

Lundi 27 décembre, les rédactions de France Médias Monde (FMM) apprenaient le décès de Françoise Hollman, directrice des partenariats, événements et identités visuelles au sein du groupe réunissant France 24, RFI et MCD. Ses obsèques ont lieu ce mercredi 5 janvier. Retour sur le parcours de cette personnalité créative, professionnelle et souriante, qui a marqué le secteur des médias.

Quel mot caractérisait le mieux Françoise Hollman ? « Solaire », « fantasque », « spectaculaire » et « drôle » pour les uns, « complice », « exigeante », « généreuse » et « classe » pour les autres. Peu importe le terme : tous ceux qui ont témoigné pour ce portrait considèrent qu’un seul mot ne permet pas d’englober la richesse de cette figure du paysage médiatique français.

Tous les esprits ayant croisé sa route sont marqués par sa personnalité. Chaque ami, membre de sa famille, ou même collègue interrogé renvoie à un autre proche, lui-même renvoyant à un autre proche… Françoise Hollman savait nouer des liens forts partout où elle passait. Véronique Revel-Rongier, une de ses amis proches et ancienne collègue à Canal +, résume : « Les gens qui l’aimaient, l’aimaient vraiment. Et elle, elle aimait vraiment les gens. »

Une partie de l’esprit Canal des années 1990

Françoise Hollman marque le monde médiatique très rapidement, dès son arrivée chez Canal + en 1993. Attachée de presse historique d’Antoine de Caunes, des Nuls ou encore de Nulle part ailleurs, elle participe à la construction de l’esprit décalé du Canal + de l’époque. Elle fait partie du trio de femmes, avec Sylvie Ruggieri et Laurence Gallot, qui dialoguent continuellement avec Pierre Lescure, PDG de Canal + à l’époque, et Alain De Greef, directeur des programmes. « On ne faisait rien, Alain et moi, sans se tourner vers elles pour en discuter avant de lancer le bateau, parce qu’on savait qu’elles allaient nous amener à infléchir, à augmenter, à nuancer… Elles faisaient partie du cœur du dispositif, elles s’y étaient imposées et c’était un atout supplémentaire pour nous », développe Pierre Lescure.

Un travail de groupe auquel Françoise Hollman offre un atout bien à elle. Véronique Revel-Rongier s’en souvient bien : « Dès qu’elle a été engagée, Sylvie Ruggieri a tout de suite senti en elle une fibre très artistique. Elle l’envoyait tout le temps parler à Alain de Greef, parce qu’elle avait le secret pour qu’Alain dise « oui » à tout ce qu’elle proposait ! »

Mettre de la beauté dans tout

Cette fibre artistique, elle l’offre à tous ses collègues qui travaillent avec elle. Tous soulignent son sens de l’esthétique, du beau. Ces neuf dernières années, Thomas Legrand-Hedel a été le binôme de Françoise Hollman. Une « complicité » qui a marqué le directeur de la communication et des relations institutionnelles de France Médias Monde (FMM) : « C’est quelqu’un qui mettait de la beauté dans tout, qui avait un sens esthétique, une sensibilité telle… Je m’en remettais à elle sur tous les plans pour avoir le bon goût des choses. C’est important de mettre de la beauté dans les choses. » Une classe innée qui la rendait singulière. « C’était quelqu’un de très élégante, sa chanson préférée était Moon River, interprétée par Audrey Hepburn. Elle avait une chevelure flamboyante. C’était l’artiste de la bande à Canal +. Ce n’était pas une femme cartésienne, organisée, mais le brin de folie, l’idée décalée », détaille Véronique Revel-Rongier avec passion.

En 2003, après Canal +, Françoise Hollman orchestre la communication au sein de plusieurs médias, de RTL à M6. Elle devient directrice de la communication de RFI en 2008 et, dix ans plus tard, directrice des partenariats, événements et identités visuelles à FMM. Elle réussit, par l’organisation de soirées dont beaucoup dans le groupe se souviennent, à créer l’émulsion entre les trois médias de l’entité. Françoise Hollman apporte avec elle son sens du bon goût, rappelle Marie-Christine Saragosse, présidente-directrice générale de France Médias Monde : « Dans la façon de décorer son bureau, de gérer la communication des trois médias, d’organiser des événements à France Médias Monde… Tout ce qu’elle touchait, elle y mettait une harmonie. »

Dans les moments les plus terribles de RFI, comme lorsque les deux envoyés spéciaux de RFI, Ghislaine Dupont et Claude Verlon, sont assassinés par des jihadistes le 13 novembre 2013 dans le nord du Mali, elle répond présente alors que tout le monde est effondré. « Quand on revient du Mali, on est tous en vrac. Les familles sont totalement désemparées et on a très peu de temps pour rendre un hommage. Elle obtient l’accord du musée du Quai Branly, puis organise les choses avec justesse pour que malgré le deuil, la cérémonie ne soit pas seulement un moment de tristesse mais aussi un moment de partage et de mémoire », raconte Marie-Christine Saragosse. Françoise Hollman sera très active pour mettre en place la bourse en leur honneur.

Un attachement profond à l’Afrique

Françoise Hollman restait particulièrement attachée à RFI, avec laquelle elle partageait des racines africaines. « Elle était Africaine dans l’âme, elle y avait passé son enfance. C’était une folle d’art africain, de musiques africaines. Son bureau était truffé de références aux arts africains », décrit Thomas Legrand-Hedel. La fille de Françoise Hollman confirme : « Elle a passé une partie de son enfance à Bouaké, en Côte d’Ivoire […] Elle a voyagé en Afrique aussi. Elle est allée au Rwanda avec RFI, elle avait vu des choses incroyables là-bas. »

Mamane, comédien nigérien et chroniqueur à RFI, avait une relation particulière avec Françoise Hollman. Elle le prend sous son aile dès son arrivée, en 2009 : « Elle avait tout le temps une idée pour ma communication, pour monter un projet, c’était toujours : « Attends, je connais quelqu’un ». Elle connaissait tout le monde, du comédien à l’attaché de presse, en passant par le producteur, le réalisateur, le technicien. » C’est aussi elle qui l’accompagne dans la création de l’univers visuel de La République du Gondwana. « Quand je parlais avec elle, c’était comme si c’était une Africaine, elle comprenait tout de l’Afrique, elle avait vraiment saisi mon humour », poursuit Mamane.

L’humoriste se souvient d’une anecdote après un de ses spectacles à l’Institut français de Dakar, lors d’un séminaire. Arrivés par Air Sénégal, dont Royal Air Maroc venait de prendre des parts, il critique pendant les quinze premières minutes la compagnie aérienne. « À la fin du spectacle, je suis allé voir Françoise, je lui ai demandé si elle avait aimé. Elle m’a dit : « Oui, oui… surtout que j’étais assise à côté du patron de la Royal Air Maroc ! Tu n’arrêtais pas, tu enfonçais le clou et je me faisais toute petite ! » Elle m’a dit ça avec son sourire et sa classe, sans aucune once de reproche. »

Humour et générosité

Au travail, elle garde toute sa carrière son sourire et son sens de l’humour. Thomas Legrand-Hedel en a été témoin : « Elle m’a fait rire très vite, dès notre première rencontre. Un humour mordant et intelligent, respectueux et moqueur à la fois, avec beaucoup d’autodérision. On savait rire de tout, et surtout de nous-mêmes. »

Dans le monde parfois concurrentiel de la communication, Françoise Hollman détonne par sa chaleur humaine et sa capacité à s’intéresser aux autres. « Elle avait une sensibilité très poussée, elle se souvenait même des dates d’anniversaire des proches de ses collègues », sourit Véronique Revel-Rongier. Un besoin d’échanger qui se retrouve dans son sourire avenant, dont se souvient parfaitement Pierre Lescure : « Françoise était la plus jeune du trio de la com’ de Canal + : elle avait ce calme, cette réflexion, cette aménité permanente, ce sourire qui donnait envie de dialoguer. Ce n’était pas un sourire de façade, c’était le sourire de quelqu’un qui allait vers le dialogue. »

Après sa disparition, les réactions se multiplient. Tous rendent hommage à une femme profondément généreuse, forte et moderne. Thomas Legrand-Hedel, son binôme à France Médias Monde, conclut : « Depuis l’annonce de sa disparition, j’ai reçu une avalanche de messages de tout le métier. Je me rends compte à quel point elle était adorée dans notre métier, parfois par des gens dont je n’avais jamais entendu parler. Je pense qu’à RFI comme dans les autres médias, elle va laisser un grand vide. »

Une directrice dans l’âme :

1983 : attachée de presse pour le groupe UGC
1996 : directrice de la communication et des programmes de Canal Plus, puis directrice déléguée auprès de la directrice générale des chaînes
2003 : directrice adjointe de la communication de RTL
2005 : directrice des relations presse et des relations publiques de TPS
2006 : directrice adjointe de la communication de M6
2008 : directrice de la communication de RFI
2012 : directrice de la communication de l’AEF qui deviendra France Médias Monde (FMM)
2018 : directrice des partenariats, événements et identités visuelles de FMM

Source

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