« Tout ça a commencé avec nous, on ne pouvait pas être absents de la Constitution », lance Valentina Miranda, élue de l’Assemblée constituante pour le Parti communiste (membre de la coalition du président élu en décembre, Gabriel Boric). Début octobre 2019, la jeune fille est lycéenne à Santiago. Le gouvernement vient d’annoncer l’augmentation de 30 pesos du prix du trajet en métro et, comme nombre de ses camarades, elle se met à sauter par-dessus les tourniquets, en signe de contestation.
La mèche s’allume alors, bien au-delà de la capitale, bien au-delà de l’augmentation annoncée – et vite abandonnée. Le 18 octobre, la rue s’enflamme et crie : « Ce ne sont pas 30 pesos, ce sont trente années. » Trente années depuis le retour à la démocratie durant lesquelles la pauvreté a certes chuté, mais pas les inégalités qui fracturent le Chili. Les manifestants blâment la Constitution : rédigée en pleine dictature (1973-1990), elle édifie l’architecture néolibérale du pays. Pour désamorcer la crise, dès le 15 novembre, l’organisation d’un référendum en vue de la rédaction d’une nouvelle loi fondamentale est actée. Au mois de mai 2021, l’Assemblée est élue.
Rupture des codes
« Notre Constitution va proposer une perspective écologique, féministe, interculturelle », assure Valentina Miranda, en référence à la parité et à la présence de constituants issus des communautés indigènes, de sa salle de travail, située au-dessus de l’hémicycle de l’ancien Congrès, à Santiago. Les constituants s’y sont installés pour des sessions semi-présentielles en raison de l’épidémie de Covid-19 et de leur éclatement géographique.
La jeune femme partage un record avec Gabriel Bori : âgé de 36 ans lorsqu’il prendra ses fonctions au mois de mars, il sera le plus jeune président du Chili ; l’étudiante est, à 21 ans, la benjamine de l’Assemblée constituante. Sous les dorures et les moulures de l’hémicycle, elle incarne cette nouvelle génération qui détonne, jusque dans la forme. Certains constituants siègent en costume ? Elle déambule dans les couloirs de l’ancien Congrès en jean et « crop top », conserve son anneau nasal. Une rupture des codes déjà adoptée par le président élu, lorsqu’il officiait comme député, depuis 2014, avant de polir son image en vue de l’accession à la présidence.
Sur son sac à dos, elle a noué le foulard coloré des populations indigènes et le tissu vert symbole de la lutte pour l’avortement légal (autorisé dans le pays seulement en cas de viol, de danger pour la vie de la femme enceinte ou non-viabilité du fœtus).
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