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Eric Adams, un “rêve américain” à la mairie de New York

Élu le 3 novembre dernier comme maire de New York, Eric Adams prend officiellement ses fonctions samedi. Une consécration pour cet Afro-Américain de 61 ans, ancien policier issu d’une famille pauvre du quartier de Brooklyn.

Le démocrate Eric Adams est officiellement investi maire de New York, samedi 1er janvier. Il devient ainsi, à 61 ans, le deuxième Afro-Américain de l’histoire à occuper ce poste. Enfant de Brooklyn, ancien policier, ancien sénateur, syndicaliste antiraciste… Son profil atypique en avait fait le grand favori du scrutin dans cette ville historiquement classée à gauche. 

Se présentant comme un démocrate « modéré », il est parvenu à séduire aussi bien les classes populaires, en jouant allègrement sur son histoire personnelle, que les milieux plus conservateurs. Le 3 novembre, il l’avait ainsi emporté haut la main contre son rival républicain, Curtis Sliwa, en raflant 67 % des suffrages exprimés. 

It’s official — our five-borough, knock-every-door, reach-every-voter campaign was successful: We have won the race for Mayor of New York City!

This is my dream come true, and I couldn’t be more proud to represent the City that we all love as your Mayor-elect ??

— Eric Adams (@ericadamsfornyc) November 3, 2021

Une success story

Eric Adams symbolise le parfait « rêve américain ». Il est né en 1960 dans le quartier de Brownsville, à Brooklyn, l’un des plus pauvres de la Grosse Pomme. Il a passé son enfance et son adolescence à South Jamaica, dans le Queens où il vivait avec ses cinq frères et sœurs et sa mère, femme de ménage, qui les élevait seule, peut-on lire dans sa biographie, publiée sur son site de campagne.

Adolescent, il tombe dans la délinquance, embarqué dans des histoires de gangs rivaux. À 15 ans, il est arrêté et frappé par des policiers puis incarcéré plusieurs semaines dans un centre de détention pour mineurs. Paradoxalement, c’est cet épisode qui a fait naître une vocation, raconte-t-il régulièrement : c’est à ce moment-là qu’il décide de devenir policier. L’objectif : « Changer le système de l’intérieur. » 

Quelques années plus tard, à 22 ans, Eric Adams intègre ainsi les rangs de la police new-yorkaise (NYPD), la plus grande force de police du pays. Il y fait carrière pendant 22 ans, jusqu’à se hisser au rang de capitaine. 

Pendant ces années, il se distingue par sa lutte contre les discriminations et les violences policières. En 1995, il cofonde « 100 Blacks in Law Enforcement Who Care » (Cent policiers noirs qui se sentent concernés, NDLR), un syndicat antiraciste dont l’objectif est de combattre les discriminations dont est victime la communauté noire. En parallèle, il devient président du Grand conseil des gardiens, une association rassemblant des policiers noirs. 

En 2006, il quitte l’uniforme pour se lancer en politique. D’abord élu au Sénat new-yorkais entre 2007 et 2013, il prend ensuite la présidence du quartier de Brooklyn, un poste souvent présenté comme un tremplin à la mairie de New York, relate le New York Times.

« Cet homme est l’un des nôtres »

Tout au long de sa campagne, Eric Adams n’a cessé de faire de son histoire à succès l’un de ses arguments, agrémentant chacune de ses prises de paroles d’anecdotes personnelles. « Je voulais raconter mon histoire », justifie-t-il, auprès du New York Times. « Je voulais que les gens se disent ‘Cet homme est l’un des nôtres.’ »

En juillet, par exemple, il avait ainsi apporté un portrait de sa mère défunte au moment d’aller voter pour la primaire démocrate à l’investiture. « Je ne suis pas censé être ici (en temps que candidat, NDLR). Mais puisque j’y suis, les New-Yorkais vont se rendre compte chaque jour qu’ils méritent également d’être dans cette ville », avait-il confié en larmes.

« New York a choisi l’un d’entre vous, l’un des nôtres. Je suis toi. Je suis vous », a-t-il aussi lancé après l’annonce de sa victoire, le 3 novembre, devant un hôtel de Brooklyn. « Ce soir, j’ai réalisé mon rêve et, de tout mon cœur, je vais lever les barrières qui vous empêchent de réaliser les vôtres », a-t-il promis.

Aujourd’hui encore, sa description sur son compte Twitter reste dans la même ligne : il se présente avant tout comme un « fier fils de Brownsville ». Le statut de « futur maire de New York » ne vient qu’après.

Une femme noire à la tête de la police new-yorkaise

Pendant sa campagne, l’ancien policier a ainsi logiquement fait de la sécurité un enjeu central. Sa principale promesse : lutter sévèrement contre la délinquance en augmentation depuis le début de la pandémie de Covid-19, tout en continuant à se battre contre les discriminations envers les Afro-Américains. 

Et c’est d’ailleurs l’objet de sa première mesure phare comme édile de New York. Avant même sa prise de fonction, il a décidé de nommer Keechant Sewell, une femme noire originaire du Queens, à la tête du NYPD. Cette dernière était jusqu’à présent responsable de la police du petit comté de Nassau, elle devra désormais gérer les 35 000 policiers de New York. 

Première femme à diriger la police de New York, elle sera la troisième personne noire à ce poste. Elle aura donc la lourde tâche de maintenir la sécurité à New York tout en restaurant la confiance de la population dans sa police, accusée d’avoir dans ses rangs des agents violents, racistes et corrompus.

Et selon Le Monde, ce choix n’a pas été anodin. Pour les départager, les candidats ont dû simuler une conférence de presse supposée se dérouler après qu’un policier blanc a tué une personne noire désarmée. Keechant Sewell l’aurait emporté en ayant eu des mots de compassion pour la victime. 

>> À lire : George Floyd : les droits civiques ont-ils progressé aux États-Unis avec #BLM ?

Un démocrate « modéré » et « pragmatique »

Mais si Eric Adams s’affiche aisément en défenseur des classes moyennes et populaires, il sait aussi rassurer les milieux d’affaires. Pour cause, si son prédécesseur Bill de Blasio se présentait comme un représentant de l’aile gauche du parti démocrate, le nouvel édile, lui, préfère se définir comme un « démocrate modéré » et « pragmatique ». 

Ces derniers mois, il n’a ainsi pas hésité à s’opposer clairement à l’ancien maire mais aussi à d’autres figures du parti, notamment à Alexandria Ocasio-Cortez, elle-même élue new-yorkaise à la chambre des Représentants et classée très à gauche.

Et la question de la sécurité ne fait pas exception. L’ancien policier s’oppose catégoriquement au projet « Defund the Police », porté par une partie du clan démocrate, qui souhaite retirer des fonds aux forces de l’ordre pour financer des projets sociaux. 

Mais c’est surtout sur la question économique qu’Eric Adams est décrié par son clan. Parmi ses propositions de campagne, il souhaite, par exemple, réduire le nombre de fonctionnaires municipaux et diminuer les impôts en mettant en place un « Tax Free Tuesday », une journée hebdomadaire sans prélèvements obligatoires.

Le nouvel édile a aussi fait de l’une de ses priorités de ramener les 25 000 à 35 000 New-Yorkais, selon les estimations, partis pendant la pandémie de Covid-19. « Le 2 janvier 2022, je prends un vol pour la Floride, et je dis à tous ces New-Yorkais qui vivent en Floride : ‘Ramenez vos fesses à New York’ », a-t-il assuré au Wall Street Journal. Tout en ajoutant : « Je ne les blâme pas d’être partis. New York est devenue trop violente, trop bureaucratique, trop chère pour faire des affaires. »

Et pour ce faire, il souhaite attirer les grandes entreprises dans la mégalopole. Un pied-de-nez franc à Alexandria Ocasio-Cortez qui s’était battue en 2019 pour empêcher Amazon d’implanter son siège dans le Queens. 

D’autres défis attendent Eric Adams à la tête de New York. Il devra gérer le retour à la normale dans les écoles, bureaux et commerces, lutter contre le mal-logement, les infrastructures en piteux état ou encore les risques climatiques mais aussi faire fermer enfin Rikers Island, une terrible prison surpeuplée, ultraviolente et insalubre.

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