Publié le : 25/12/2021 – 15:40
Au Soudan, des milliers d’opposants au pouvoir militaire se dirigent, samedi, vers le palais présidentiel de Khartoum, où siègent les autorités de transition dirigées par le général Burhane. Les forces de sécurité tentent de les repousser, en lançant des grenades lacrymogènes sur les manifestants.
Les forces de sécurité soudanaises tirent des grenades lacrymogènes pour tenter de repousser les milliers d’opposants au pouvoir militaire qui s’approchent, samedi 25 décembre, du palais présidentiel. Les manifestants bravent une coupure d’Internet et de téléphone ainsi qu’une répression qui, en deux mois de putsch, a fait 48 morts.
La foule, désormais à quelques dizaines de mètres du palais où siègent les autorités de transition chapeautées par le général Abdel Fattah al-Burhane, auteur du coup d’État mené le 25 octobre, avance et recule au gré des charges policières. À chacune d’elle, de nouveaux blessés sont évacués par des manifestants, a constaté un journaliste de l’AFP.
Des barrages de grenades lacrymogènes attendent également les protestataires qui tentent de traverser les ponts reliant ses banlieues à Khartoum.
Dès les premières heures du jour, les autorités ont tenté de verrouiller le pays : d’abord, le réseau Internet mobile a disparu, puis les communications téléphoniques n’ont plus fonctionné et les manifestants qui prévoyaient de venir des différents quartiers et banlieues vers le palais présidentiel ont découvert que dans la nuit des grues étaient venues déposer d’énormes containers en travers des ponts sur le Nil.
Il n’empêche, ils étaient de nouveau samedi des dizaines de milliers à Khartoum, dans ses banlieues, mais aussi à Madani, à 150 kilomètres au sud de la capitale, à Atbara (nord) et à Port-Soudan (est), selon des témoins, à conspuer l’armée, son chef Burhane et même le Premier ministre civil Abdallah Hamdok sous une nuée de drapeaux soudanais et les youyous de manifestantes.
Un dernière mobilisation marquée par des tirs à balles réelles
Selon des témoins, ils étaient des milliers à Khartoum et dans ses banlieues et des centaines à Madani, une ville à 150 kilomètres au sud de la capitale.
Il y a moins d’une semaine déjà, pour le troisième anniversaire du lancement de la « révolution » ayant forcé en 2019 l’armée à mettre fin à 30 ans de dictature militaro-islamiste d’Omar el-Béchir, les partisans d’un pouvoir civil avaient montré qu’ils pouvaient encore mobiliser.
Ce jour-là, les forces de sécurité ont tiré à balles réelles, fait pleuvoir des grenades lacrymogènes sur les centaines de milliers d’entre eux sortis dans la rue et même recouru, selon l’ONU, à une arme déjà utilisée au Darfour en guerre : le viol.
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Samedi, les autorités ont eu recours à un autre outil de taille : comme durant près d’un mois après le putsch, elles ont coupé les Soudanais du monde.
« La liberté d’expression est un droit fondamental et cela inclut l’accès total à Internet », a déjà protesté l’émissaire de l’ONU, Volker Perthes, rappelant que « personne ne devrait être arrêté pour avoir eu l’intention de manifester » alors que les militants font état de rafles depuis vendredi soir dans leurs rangs.
Redoutant un nouveau déchaînement de violence, le syndicat de médecins pro-démocratie qui recense les victimes de la répression depuis 2018 a dit « demander au monde de surveiller ce qui va se passer » alors que les militants peinent à faire sortir du pays des images via les militants de la diaspora.
Les cortèges doivent converger vers le palais présidentiel. Mais dès vendredi, le gouvernorat de Khartoum a prévenu : les forces de sécurité « s’occuperont de ceux qui contreviennent à la loi et créent le chaos » notamment aux abords « des bâtiments de souveraineté stratégique », alors qu’à chaque manifestation, les premiers tirs ont lieu devant le Parlement, le palais présidentiel ou le QG de l’armée.
Nouvelle manifestation prévue le 30 décembre
En apparence, après son putsch dénoncé par le monde entier ou presque, le général Burhane a rétabli le Premier ministre civil Abdallah Hamdok, mais le Soudan n’a toujours aucun gouvernement, condition sine qua non à la reprise de l’aide internationale, vitale pour ce pays, l’un des plus pauvres au monde.
En outre, il promet les premières élections libres depuis des décennies en juillet 2023, sans convaincre les partisans d’un pouvoir uniquement civil dans le pays, sous la férule de l’armée quasiment sans interruption en 65 ans d’indépendance.
Ils ont ainsi déjà annoncé qu’ils manifesteraient de nouveau le 30 décembre au Soudan, englué dans le marasme politique et une inflation à plus de 300 %.
Avec AFP
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