Chroniqueuse, écrivaine, photographe et surtout égérie de la scène artistique californienne des années 1960-1970, l’Américaine Eve Babitz est morte à l’hôpital de Los Angeles, vendredi 17 décembre, des suites de la maladie de Huntington. Elle était âgée de 78 ans.
Le nom d’Eve Babitz évoque d’emblée une photo célèbre prise en 1963, par un photographe du magazine Time, Julian Wasser, dans une salle du Musée d’art de Pasadena (Californie). Elle montre une partie d’échecs qui commence : d’un côté, Marcel Duchamp – il est en costume noir et joue avec les blancs ; de l’autre, la jeune Eve Babitz, entièrement nue (elle a la peau très blanche et joue avec les noirs). Notons que sa posture affranchie n’a pas l’air de déconcentrer du tout le père – déjà chenu – des célèbres « ready-made ».
Comment en vient-on à poser « en tenue d’Eve » – ce sera, plus tard, le titre d’un de ses livres publié en février 2021 (Points, 96 p., 5,90 €) – à tout juste 20 ans, devant la figure tutélaire de l’art du XXe siècle ? Sans doute faut-il pour cela appartenir soi-même au milieu artistique, ce qui est le cas d’Eve Babitz. La jeune fille est un pur produit d’Hollywood. C’est là qu’elle est née, le 13 mai 1943, d’une mère qui dessinait des maisons et d’un père violoniste classique dans l’orchestre de la Twentieth Century Fox. Ses parents sont très introduits. Ils pique-niquent avec Bertrand Russell. Les amis de la famille s’appellent Greta Garbo et Charlie Chaplin. Quant au parrain d’Eve Babitz, il n’est autre que « le tout petit, joyeux et génial » Igor Stravinsky. Alors qu’elle a 16 ans et juge les adultes « bidons et flippants », Igor glisse à Eve des scotchs sous la table pendant le dîner et dépose des pétales de rose dans son corsage.
De faux airs de Brigitte Bardot
A l’adolescence, Babitz lit avec avidité. Virginia Woolf et Colette sont ses idoles. A 14 ans, elle rédige des « Mémoires » intitulés – à l’intention de ses parents ? – Moi, je n’élèverais pas mon gosse à Hollywood. Plus tard, elle sera connue comme l’inspiratrice, à la fois muse et madone, de Harrison Ford et de Jim Morrison à qui elle se vantait d’avoir fait des avances « au bout de trois minutes seulement ». Vie débridée avec célébrités, art, fêtes, drogues et liberté sexuelle… Babitz relatera tout ça dans ses livres. Mais ce n’est qu’au début des années 1970 qu’elle se met à écrire vraiment. Auparavant, elle conçoit des pochettes de disques, avant de devenir chroniqueuse pour les magazines Vogue ou Rolling Stone, notamment.
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