« L’héritage redevient un facteur déterminant dans la constitution du patrimoine » en France. Et porte en lui « le risque d’un dérèglement profond de l’égalité des chances ». Il faut donc, expliquent une note publiée par le CAE, organe de recherche chargé de conseiller le gouvernement; « réforme en profondeur » sa taxation. En cinquante ans, la part de la fortune héritée dans le patrimoine total est passée de 35% à 60% en France, relève l’étude. Au sein d’une génération donnée, la moitié des individus auront hérité de moins de 70 000 euros de patrimoine tout au long de leur vie, quand le top 1% héritera en moyenne de plus de 4,2 millions d’euros.
Trop d’éxonérations
Les inégalités de patrimoine sont ainsi bien supérieures à celles des revenus du travail, constatent les auteurs. En cause: un impôt sur les successions en principe progressif, mais « miné » par des exonérations et des exemptions (assurance-vie, biens professionnels, donations en nue-propriété, etc.), qui favorisent les plus grandes transmissions. Au total, « 40% du patrimoine transmis échappe au flux successoral » appréhendé par l’administration fiscale. La note (disponible ici) propose donc de réduire, voire de supprimer ces exemptions, afin d’améliorer la progressivité de l’impôt.
Une réforme pour 2032?
Comme l’OCDE ou le rapport des économistes Olivier Blanchard et Jean Tirole remis récemment au président de la République, le CAE défend aussi l’idée de taxer les successions non plus au moment du décès d’une personne, mais sur l’ensemble des sommes ou biens reçus par un individu tout au long de sa vie, comme les donations par exemple. Un héritier payerait le même montant d’impôt s’il reçoit 700.000 euros d’un de ses parents à son décès, ou s’il reçoit durant sa vie trois donations de 100.000 euros (qui peuvent actuellement bénéficier d’abattements) et 200.000 euros de chacun de ses parents à leur décès. Cette réforme, qui devrait être mise en place « au travers d’une période de transition longue (de 10 à 18 ans) », devrait aussi inclure une « garantie de capital » pour tous, versée à la majorité « pour limiter les inégalités les plus extrêmes » dans l’accès à la formation ou au logement notamment. Elle permettrait de percevoir entre 9 milliards et 19 milliards d’euros d’impôts supplémentaires, selon différentes simulations de mise en oeuvre, concluent les auteurs.
Des Français hostiles
En 2018, le Conseil des prélèvements obligatoires avait déjà préconisé une relèvement de la taxation des héritages. Mais le terrain est sensible, car il mêlent les purs héritages et l’accumulation des fruits d’une vie de travail. A l’époque, un sonfdage réalisé par le Crédoc pour le think tank France Stratégie, avait montré que 65 % des Français pensaient qu’ils bénéficieront d’un héritage ou d’une donation. Il avait montré aussi que le consentement à l’impôt sur la transmission était particulièrement faible. 87 % des personnes interrogées souhaitaient non pas une hausse, mais une diminution de ces droits. Seule une petite minorité (9 %) pensait que l’héritage entretenait les inégalités de patrimoine. Plus étonnant, ces opinions ne dépendaient pas du niveau de revenu ou de patrimoine des sondés. Nos écnomistes s’aventurent, on le voit, sur un terrain miné, surtout en période électorale… (Avec AFP)
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