Envisagé par le gouvernement, l’introduction potentielle d’un passe sanitaire pour les entreprises en France a été vivement critiquée, lundi, par les partenaires sociaux, lors d’un entretien avec la ministre du Travail, Elisabeth Borne.
Les partenaires sociaux ont fait part au gouvernement, lundi 20 décembre, de leur opposition à l’instauration éventuelle d’un passe sanitaire pour le travail, lors d’une consultation avec la ministre du Travail, Elisabeth Borne, qui a affirmé, de son côté, que « rien n’est acté ».
« Ce qui ressort des échanges c’est que les organisations syndicales n’y sont pas favorables, et que les organisations patronales sont réservées et s’interrogent sur les modalités pratiques de mise en œuvre », a-t-elle noté auprès de l’AFP.
Généraliser le passe à toute la sphère professionnelle – au-delà des secteurs de la santé et au contact du public comme c’est le cas aujourd’hui – n’est qu’une « hypothèse », a souligné, dimanche, le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal.
L’exécutif ne cache cependant pas sa volonté de trouver les moyens de mettre la pression sur les non-vaccinés face à la cinquième vague du Covid-19 et l’arrivée du variant Omicron en France.
« Protection supplémentaire » ou « usine à gaz » ?
Pour le « Monsieur vaccin » du gouvernement, Alain Fischer, qui s’exprimait, lundi, sur France Inter, cette extension, « sous un angle scientifique, c’est sûr que c’est une protection supplémentaire qui devrait éviter une crise sanitaire grave ».
Mais chez les partenaires sociaux, le scepticisme est de mise, notamment sur l’application d’une telle mesure.
Selon François Asselin (CPME), au fil de la réunion, il y a eu « plus de questions abordées que de réponses apportées ». Il a cité notamment le contrôle du passe, la situation des salariés qui ne repassent pas tous les jours dans l’entreprise ou encore la question du secret médical. « Je ne suis pas sûr qu’il faille en passer par là pour convaincre les non-vaccinés », a-t-il ajouté.
Du côté du Medef, un porte-parole a relevé que cela « semble une manière d’imposer la vaccination par l’intermédiaire des entreprises. Or c’est au gouvernement d’assumer cette responsabilité ».
Pour Dominique Métayer, président de l’Union des entreprises de proximité (U2P), « s’il faut en passer par là, oui, ce qu’on veut absolument éviter ce sont les fermetures obligatoires ».
« Ils ont brandi cette épée de Damoclès » mais « on a aujourd’hui des outils comme la vaccination, les gestes barrière et déjà certaines restrictions d’activité », a-t-il noté à l’issue de la réunion.
Benoît Serre, vice-président de l’Association nationale des DRH, a évoqué, lundi, sur Sud Radio « une usine à gaz » susceptible de générer « de la tension » au sein des entreprises.
Du côté des syndicats, le ton est nettement hostile, plusieurs d’entre eux relevant à l’issue de la réunion que cela pose « tout un tas de questions » : qui va contrôler ? quelles sanctions ?, etc. Au nom de la CFDT, Marylise Léon s’est déclarée « très, très sceptique », craignant des situations « vraiment conflictuelles » dans certaines sociétés.
Le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, avait fustigé, avant même la réunion, une mesure « absurde et totalement inefficace », tandis que pour Michel Beaugas (FO), « mieux vaut convaincre et inciter que contraindre ».
Télétravail étendu
Cyril Chabanier (CFTC) s’est dit « très réservé », notant qu’au vu de l’opposition « un peu totale », « ça risque de freiner », tandis que François Hommeril (CFE-CGC) a relevé que les clusters en entreprise restent « très exceptionnels », jugeant qu’ »à ce titre, le passe ne sert à rien ».
Soulignant que l’objectif de la réunion était « de regarder tous les leviers qu’on peut mobiliser face au variant Omicron », qui est « beaucoup plus contagieux », Elisabeth Borne a, par ailleurs, fait état d’un « relatif consensus sur le fait de remonter la cible actuelle à trois, quatre jours de télétravail par semaine », contre deux à trois jours actuellement.
Après la ministre du Travail, ce sera, mardi, au tour de la ministre de la Fonction publique, Amélie de Montchalin, d’ouvrir une consultation « sur toutes les mesures de protection possibles avec les syndicats de la fonction publique », selon son entourage.
Le Premier ministre, Jean Castex, doit lui recevoir les groupes parlementaires pour discuter des futurs champs d’application du passe sanitaire.
Avec AFP
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