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Une violence « systémique et généralisée » envers les migrants aux frontières européennes

Des soldats de l’armée espagnole affrontent des migrants près de la frontière entre le Maroc et l’Espagne, dans l’enclave espagnole de Ceuta, le 18 mai 2021. BERNAT ARMANGUE / AP

Violences physiques et sexuelles, harcèlement, extorsion, vol et impossibilité de déposer une demande d’asile : non seulement la violence aux frontières externes et internes de l’Union européenne est devenue « systémique et généralisée », mais la pratique des refoulements illégaux s’est « normalisée », pour devenir un « outil de gestion des frontières », selon un rapport publié jeudi 16 décembre par sept ONG européennes, le troisième du genre depuis le début de l’année.

Entre janvier et novembre 2021, les associations, basées en Italie, Hongrie, Bosnie-Herzégovine, Serbie, Grèce, Macédoine du Nord et Belgique, réunies au sein de l’initiative Protecting rights at borders (« Protéger les droits aux frontières »), ont collecté des témoignages couvrant près de 12 000 incidents. Un tiers des cas se sont produits à la frontière entre la Croatie et la Bosnie-Herzégovine. Dans 18 % d’entre eux, les refoulements concernaient des familles. En tête, les Afghans, qui représentent environ 30 % des migrants entendus.

Selon Charlotte Slente, secrétaire générale du Conseil danois des réfugiés (DRC), ces 12 000 incidents ne sont que « le sommet de l’iceberg ». Ils permettent, toutefois, de tirer quelques conclusions. D’abord, le nombre de refoulements ne semble pas baisser, au contraire. La violence extrême, par contre, a diminué : « Les passages à tabac ou les morsures de chien sont moins fréquents », remarque ainsi Mme Slente.

Refoulements à la chaîne

Elle y voit un effet de la médiatisation de certains incidents. Les Etats, dit-elle, font en sorte « que les violations des droits de l’homme ne soient pas visibles ». Or, ce développement est particulièrement inquiétant : « C’est presque comme si les refoulements étaient devenus acceptables et, dans une certaine mesure, approuvés implicitement par certains Etats membres, quand la violence n’atteint pas des extrêmes causant un tollé général », observe Mme Slente.

Arrêté avec son ami en Croatie, à quinze kilomètres de la frontière slovène, début juillet, un jeune Afghan raconte les coups infligés par les policiers : « Ils ont trouvé deux téléphones et 140 marks convertibles [monnaie bosniaque, soit 71 euros], qu’ils ont immédiatement confisqués. Un des policiers nous a frappés dans les côtes avec une matraque plusieurs fois parce que nous ne voulions pas donner les mots de passe [des téléphones]. » Les deux garçons ont été renvoyés en Bosnie.

Le rapport mentionne aussi des « refoulements en chaîne ». Un exemple : ces migrants érythréens et somaliens, arrivés en Italie en juillet, qui ont informé les policiers italiens qu’ils souhaitaient demander l’asile, mais qui ont été renvoyés en Slovénie, où d’autres policiers les attendaient. Ils affirment avoir passé trois jours enfermés dans un bâtiment, sans eau, ni nourriture ou accès aux toilettes. Finalement, les policiers slovènes les ont transférés auprès de leurs collègues en Croatie, qui les ont reconduits à la frontière bosniaque.

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