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Dans la « jungle » entre la Pologne et la Biélorussie, un statu quo glaçant

Le poste de contrôle de Kuznica-Bruzgi (Pologne), à la frontière entre la Pologne et le Bélarus, le 6 décembre 2021. KACPER PEMPEL / REUTERS

C’est devenu, au fil des semaines, une sinistre routine : chaque nuit, plusieurs dizaines de migrants forcent, avec le soutien actif des gardes-frontières biélorusses, les fils barbelés le long de la « frontière verte » de l’Union européenne, entre la Pologne et la Biélorussie, parsemée sur près de 180 kilomètres d’épaisses forêts, de marécages et de rivières. Ces incidents ne se font pas sans violences : jets de pierre et de pétards en direction des forces polonaises, provocations de la part de l’armée biélorusse. Pendant ces assauts, qui engagent parfois jusqu’à deux cents personnes, les forces biélorusses aveuglent les gardes polonais avec des stroboscopes et des lasers.

Sur le front humanitaire, les activistes dévoués à l’aide des migrants sont exténués. Ils sont une cinquantaine à se relayer en permanence depuis des mois, pour apporter les premiers secours à ceux qui, perdus dans la forêt, signalent leur détresse par téléphone. Au-delà des vêtements chauds, de la nourriture, des boissons ou des kits de survie, ce sont les batteries de recharge des téléphones portables qui sont les biens les plus convoités. Dans les immenses forêts de Podlachie, appelées par les migrants « la jungle », on peut survivre plusieurs journées sans nourriture, mais pas sans la localisation GPS de son téléphone.

La première semaine de décembre, les températures nocturnes dans la région sont tombées en dessous de – 10 °C. Il fait nuit noire à 16 heures. Le bilan officiel d’une vingtaine de morts est largement sous évalué selon les activistes, et les populations locales relatent régulièrement de macabres histoires de corps aperçus en forêts ou dans les marécages. En raison du flou juridique entourant le statut de la zone, les habitants restent relativement discrets vis-à-vis des autorités, car toute documentation photographique ou vidéos était encore récemment interdite. L’endroit reste largement surmilitarisé.

Piège infernal

Après trois mois d’interdiction totale d’accès aux médias et aux ONG à proximité immédiate de la frontière côté polonais, pour cause d’« état d’urgence », les autorités de Varsovie ont été forcées de lever légèrement ces restrictions. Les règles n’en restent pas moins draconiennes : l’accès des journalistes est encadré par l’armée et ne peut se faire de manière autonome. Les médias ne peuvent recueillir des informations qu’auprès des sources officielles, polonaises et biélorusses, et par le biais des rares vidéos indépendantes fuitant de la zone. Trois photoreporters qui se trouvaient pourtant en dehors du secteur interdit ont été victimes de violences de la part de l’armée polonaise.

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