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Au Bénin, la main lourde de la justice sur les opposants politiques

Des soutiens de l’opposante Reckya Madougou, à Porto-Novo (Bénin), le 10 décembre 2021. YANICK FOLLY / AFP

Au Bénin, les procès d’opposants s’enchaînent et les verdicts sont lourds. Quatre jours après la condamnation du professeur de droit Joël Aïvo à dix ans de détention, l’ancienne ministre Reckya Madougou, dont la candidature à l’élection présidentielle du 11 avril avait également été rejetée, a été condamnée samedi 11 décembre à vingt années de réclusion criminelle et 50 millions de francs CFA (76 200 euros) d’amende par la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet) pour « complicité d’actes terroristes ». Quatre autres prévenus jugés dans cette affaire ont été sanctionnés de la même peine, un autre a été acquitté.

« Monsieur le Président, tout le monde aura compris que je ne suis pas une terroriste mais que je reste une brave militante qui depuis une vingtaine d’années, s’investit dans l’éducation citoyenne des jeunes, le leadership et l’autonomisation des femmes », a déclaré à la barre Reckya Madougou, qui se présente comme une farouche défenseure de la démocratie dans son pays.

La veille de son procès, elle avait été extraite au lever du soleil de la maison d’arrêt d’Akpro-Missérété, à la périphérie de Porto-Novo, capitale du Bénin, où elle était détenue depuis neuf mois. Conduite à l’intérieur d’une fourgonnette de l’administration pénitentiaire, elle est arrivée peu après au tribunal où l’attendaient des supporteurs vêtus de t-shirt à son effigie.

Femme d’influence en Afrique de l’Ouest

L’audience s’est ensuite déroulée dans un climat houleux. En milieu de matinée, Antoine Vey, l’un des avocats français de Reckya Madougou, a quitté la salle d’audience. « La Criet n’est pas une juridiction impartiale et indépendante », s’est-il emporté lors d’une conférence de presse improvisée à l’extérieur du tribunal, dénonçant la mainmise du pouvoir exécutif sur les juges. « Le scénario de ce procès est écrit à l’avance », a-t-il conclu.

Agée de 47 ans, deux fois ministre dans son pays, Reckya Madougou est une femme d’influence en Afrique de l’Ouest. Entre 2016 et 2020, elle a ainsi été la conseillère spéciale du chef de l’Etat togolais Faure Gnassingbé et a supervisé, à ce titre, la mise en place d’un mécanisme de financement agricole. On la dit proche aussi du Sénégalais Macky Sall.

Brillante et déterminée, elle a reçu de nombreuses distinctions comme le prix international Femme de courage du département d’Etat américain ainsi que les félicitations du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) pour ses efforts en faveur de l’autonomisation des femmes et des jeunes. Elle s’est lancée dans la course à la présidentielle en début d’année, après avoir été investie par le parti « Les Démocrates » de l’ancien président de la République Thomas Boni Yayi (2006-2016), dont elle fut notamment garde des sceaux.

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