Chronique. « Dans un monde qui change vite, les occasions de faire des erreurs sont légion. » Arthur Burns savait de quoi il parlait. Au cours de ses deux mandats à la tête de la Réserve fédérale (Fed), de 1970 à 1978, l’ex-conseiller de Richard Nixon s’est beaucoup trompé, alors que les Etats-Unis étaient confrontés à l’après-guerre du Vietnam, à la suspension de la convertibilité du dollar en or et à deux chocs pétroliers.
De sa présidence à la banque centrale des Etats-Unis, l’histoire a surtout retenu ses faux pas de politique monétaire qui conduisirent à une période de stagflation, mélange de deux phénomènes que l’on croyait jusqu’alors incompatibles : une forte inflation et une faible croissance économique débouchant sur un chômage de masse. Ironie du sort, c’est un démocrate, Paul Volcker, qui appliqua les recettes de l’école monétariste pour éteindre l’incendie. Il releva le taux directeur de la Fed de neuf points entre 1979 et 1981 pour le porter à 20 %. Un remède de cheval qui eut raison de la hausse des prix et des salaires, mais aussi de la croissance et de la présidence de Jimmy Carter.
Jerome Powell, qui est sur le point d’être renouvelé à la tête de la Fed, et Christine Lagarde, son homologue à la Banque centrale européenne, sont à leur tour confrontés au risque inflationniste. La hausse des prix atteint 6,2 % aux Etats-Unis, un record depuis 1990, et 4,1 % en zone euro.
Argent gratuit
Eux aussi doivent composer avec un monde en mutation accélérée. Le choc de la pandémie et les incertitudes qu’elle génère accroissent d’autant plus la probabilité de faire des erreurs, que les banques centrales ne savent pas comment sortir de la situation qu’elles ont elles-mêmes créé. En inondant le système financier de liquidités et en rendant l’argent gratuit avec des taux d’intérêt proches de zéro, elles ont favorisé la formation de bulles spéculatives (immobilier, Bourse), encouragé un endettement mondial qui avoisine les 300 000 milliards de dollars, tout en aggravant les inégalités.
Mettre fin à cette ère de l’argent magique, c’est prendre le risque de casser une croissance chèrement acquise et déstabiliser des marchés financiers jamais rassasiés de liquidités. Persévérer dans ces politiques dites « non conventionnelles » serait tout aussi hasardeux. Même si les années 1970 ne sont pas les années 2020, l’expérience d’Arthur Burns est là pour nous éclairer.
Sa principale erreur fut d’accorder trop d’importance aux causes « exogènes » de l’inflation. Burns a été d’abord persuadé que le problème provenait du pouvoir excessif des syndicats pour négocier des hausses de salaires, et du monopole de certaines grandes entreprises qui leur permettait d’augmenter les prix à leur guise. Mais le contrôle des prix instauré par Nixon en août 1971 échoua à calmer l’inflation.
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