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ReportageDans le village de Mamakhel, à une centaine de kilomètres au sud de Kaboul, la prise de pouvoir par les talibans a paradoxalement permis de renouer avec la paix, après des années de souffrance.
Comme nombre de villages afghans, Mamakhel, dans la province du Wardak, situé à une centaine de kilomètres au sud de Kaboul, a retrouvé un semblant de paix depuis le retour des talibans au pouvoir, en août. « Ici, la guerre n’avait pas cessé depuis 2006, et elle s’est arrêtée il y a peu », explique Naeem, un paysan à la peau burinée par des heures de labeur sous le soleil. Soutiens de l’ancien régime, les Américains et leurs alliés, présents en Afghanistan depuis 2001, sont partis. Pour l’heure, la seule opposition aux talibans vient des combattants de l’organisation Etat islamique. S’ils mènent des attaques dans les grandes villes du pays, ils ont, pour l’instant, épargné les zones rurales.
« Avant août, je ne peux pas dire que les combats duraient du matin au soir. Parfois, les talibans venaient dans notre village, tiraient deux balles et partaient se réfugier dans les montagnes, se souvient Naeem. L’armée afghane, en revanche, répondait lourdement avec des roquettes, des obus, et les balles pleuvaient sur nous. » Cela relève désormais du souvenir. En ce mercredi de novembre, sous un soleil pâle et un vent glacial, les enfants, filles et garçons, sont nombreux à jouer dans les rues du village, ce qu’ils ne faisaient plus depuis longtemps.
Une école pour filles
« Avant, les garçons ne pouvaient pas se rendre à l’école à cause des échanges de tirs entre les deux fronts, se rappelle le villageois. Aujourd’hui, ils y vont, et nous ne sommes même plus inquiets. » Avant la victoire des talibans, les deux fillettes de Naeem restaient à la maison, faute d’école pour elles dans le village. Aujourd’hui, pour la première fois, elles suivent des cours d’alphabétisation à la mosquée du village. Les talibans autorisent l’éducation des Afghanes jusqu’à l’âge de 12 ans.
Dans le village de Mamakhel, dans la province du Wardak (Afghanistan), le 10 novembre 2021. Un mur est recouvert de dessins d’enfants représentant des scènes de guerre. WILLIAM DANIELS POUR « LE MONDE »
Pour sa sécurité, Naeem avait creusé deux grands fossés de part et d’autre de ses champs de blé et de pommes de terre. « De la taille d’un homme, je m’y réfugiais au moment des combats. » Montrant l’autre côté de la route, il ajoute : « Vous voyez ce bâtiment ? C’était une base militaire de l’armée régulière afghane, lorsque les combats commençaient, on ne comprenait plus qui tirait sur qui. » Parfois, alors que les tirs faisaient rage, arroser simplement son champ devenait une tâche quasi impossible. Désormais, il cultive des terres auparavant inaccessibles, car trop proches de la ligne de front.
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Mais, si les tirs se sont tus, les plaies de la guerre sont loin d’être refermées. Sur un des murs proches de la mosquée du village, des dessins d’enfants montrent des avions qui larguent des bombes, des chars qui roulent entre les maisons et des hommes les mains en l’air et le visage effrayé. Certaines portes du village sont encore criblées de balles. Les chemins menant au village portent les stigmates des engins explosifs artisanaux.
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