Livre. Pour qui veut lever une part du voile qui recouvre l’Afghanistan, pays tourmenté par l’histoire, l’ouvrage de Michael Barry Le Royaume de l’insolence. L’Afghanistan, 1504-2001 (Flammarion), réédité en 2011, demeure une référence. Pour cette raison, la sortie du nouveau livre de cet universitaire américain, Le Cri afghan, méritait le temps de la lecture. Une attention d’autant plus nécessaire que cet érudit persanophone a décidé, dans un délai très court, de confronter sa science au fracas de l’histoire immédiate, le retour des talibans, le 15 août, à la tête d’un pays qu’ils avaient déjà gouverné entre 1996 et 2001.
Fait chevalier de la Légion d’honneur, le 26 mars, Michael Barry est un parfait francophile. Professeur d’université aux Etats-Unis, puis à Kaboul, à l’Université américaine, il a consacré une grande partie de sa vie à cette région du monde dont l’histoire doit beaucoup à sa géographie. Il décrit, dans un style clair, ce pays qui est, depuis des millénaires, « la principale route praticable, militaire et commerciale à travers les montagnes qui séparent l’Asie centrale et l’Inde ».
Une indépendance qui volera en éclats
Il résume, avec pédagogie, comment cette terre, objet de convoitise des empires, a opposé, tout au long du XIXe siècle, dans le cadre du « Grand Jeu », la Russie et la Grande-Bretagne. Il souligne combien les guerres anglo-afghanes ont nourri durablement la « mythologie nationale selon laquelle le pays peut résister victorieusement à tout envahisseur étranger, si puissant soit-il ». On y apprend utilement que l’Afghanistan a déjà été stable sous le règne de l’émir Abdur Rahman Khan, entre 1880 et 1901. Symbole de l’unité afghane, il laisse, à sa mort, un Etat « relativement solide aux ambitions centralisées (…), même si les hauts pays tribaux continuent d’échapper à tout contrôle direct ».
L’Afghanistan moderne, de 1919 à 1978, offre ensuite le visage d’un pays ayant bien du mal à faire vivre une indépendance qui finit par voler en éclats avec l’invasion soviétique. Pendant cette période, deux univers s’affrontent sur la même terre : « Un royaume neutraliste gouverné par une petite élite occidentalisée, très laïque mais fortement nationaliste, plaqué sur un pays rural et profondément religieux. » Faute de pouvoir réduire la résistance des moudjahidine afghans, l’occupation soviétique et sa sévère répression contre les populations civiles ne feront qu’approfondir ce fossé. Le départ des troupes de Moscou, en 1989, ouvre une période de guerre civile qui finit, en 1996, par porter au pouvoir des talibans soutenus, dit l’auteur, par « un pouvoir pakistanais cynique ».
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