La France organise, dimanche, une réunion intergouvernementale avec ses homologues européens, dans la ville meurtrie de Calais, afin de renforcer la coopération dans la lutte contre « l’immigration clandestine et les réseaux de passeurs ». Une rencontre à laquelle le Royaume-Uni n’est pas convié.
Quatre jours après le pire drame migratoire survenu dans la Manche, un sommet européen est organisé, dimanche 28 novembre, à Calais, pour renforcer la lutte « contre les réseaux de passeurs », mais sans les Britanniques, exclus par la France.
Réunissant les ministres en charge de l’immigration allemand, néerlandais, belge, français, ainsi que la Commissaire européenne aux Affaires intérieures, cette rencontre intergouvernementale de travail débutera à 15 h, dans la ville portuaire du nord de la France. Les agences européennes de police criminelle Europol et des frontières Frontex y seront représentées.
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La rencontre a pour objet « la lutte contre l’immigration clandestine et les réseaux de passeurs », selon la note de presse du ministre français de l’Intérieur, Gérald Darmanin, samedi soir. Il s’agit de renforcer « la coopération opérationnelle dans la lutte contre les passeurs car ce sont des réseaux internationaux qui opèrent dans différents pays européens », argumente pour l’AFP l’entourage du ministre.
La réunion se déroulera toutefois sans la partie britannique, pourtant concernée au premier chef : Gérald Darmanin a annulé la participation de son homologue Priti Patel, vendredi, en riposte à une lettre publiée la veille, sur Twitter, par Boris Johnson, demandant à Paris de reprendre les migrants arrivant en Grande-Bretagne depuis la France.
Dans un message à Priti Patel, Gérald Darmanin s’est dit « déçu » des exigences du Premier ministre britannique et a jugé « encore pire » leur publication. Le président Emmanuel Macron avait, lui aussi, tancé Boris Johnson pour des méthodes « pas sérieuses ».
« Défi partagé »
Samedi, le vice-président de la Commission européenne, Margaritis Schinas, a estimé qu’il revenait à la Grande-Bretagne de résoudre ses problèmes relatifs à l’afflux des migrants.
Le Royaume-Uni « a quitté l’Union européenne », en conséquence il « doit à présent décider comment organiser la gestion du contrôle de ses frontières », a affirmé Margaritis Schinas.
Le gouvernement britannique a insisté sur le fait que les relations avec la France restaient « fortes ». La lettre (de M. Johnson) « reconnaît absolument tout ce que le gouvernement et les autorités françaises ont fait, qu’il s’agit d’un défi partagé », a assuré à la BBC le secrétaire d’État britannique à la Sécurité, Damian Hinds.
« Mais maintenant, particulièrement poussés par cette terrible tragédie, nous devons aller plus loin, approfondir notre partenariat, élargir ce que nous faisons, élaborer de nouvelles solutions », a-t-il ajouté.
Le naufrage, qui a coûté la vie à au moins 27 personnes mercredi, est le pire drame migratoire dans la Manche, désormais sillonnée quotidiennement à bord de fragiles embarcations par des migrants tentant de rallier les côtes anglaises.
Ces traversées se sont développées depuis 2018 face au bouclage du port de Calais et d’Eurotunnel, que les migrants empruntaient en se cachant dans des véhicules.
Une réponse « uniquement sécuritaire » ?
L’enquête sur le naufrage est menée à la Juridiction nationale chargée de la lutte contre la criminalité organisée (Junlaco) à Paris. Mais rien n’a filtré, ni sur la nationalité des victimes ni sur les causes du naufrage.
Maryam Nuri Hama Amin, une jeune kurde irakienne partie rejoindre son fiancé, figure parmi les victimes, selon sa famille, en deuil, interrogée par l’AFP à Soran, en Irak.
Selon les sauveteurs, les naufragés étaient à bord d’un « long boat », un bateau pneumatique à fond souple d’une dizaine de mètres de long, dont l’utilisation s’est accrue depuis l’été.
Seuls un Irakien et un Somalien ont été sauvés. Hospitalisés à Calais, ils devaient être entendus par les enquêteurs.
Régulièrement accusé par Londres de ne pas faire assez contre ces traversées, Paris met en avant les moyens déployés sur le littoral pour y faire face.
Selon Gérald Darmanin, 30 filières de passeurs ont été démantelées sur les dix premiers mois de l’année, contre 22 pour l’année 2020. Et depuis le 1er janvier, 1 500 personnes liées à ces réseaux ont été arrêtées.
Mais le trafic ne faiblit pas, l’Allemagne étant désormais montrée du doigt comme une base arrière des passeurs.
Pour les associations d’aide aux migrants du Calaisis, la réunion risque pourtant de ne rien résoudre, notamment du fait de l’absence britannique.
Pour François Guennoc, président de l’Auberge des Migrants, « quand le gouvernement accuse les passeurs, c’est une façon de masquer ses propres responsabilités ». « S’il y avait des possibilités de passages légaux en Grande-Bretagne, il n’y aurait pas de passeurs », juge-t-il.
Juliette Delaplace, de la mission du Secours catholique auprès des exilés, craint pour sa part une réponse « uniquement répressive et sécuritaire ».
Avec AFP
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