La mer est grise, étale, presque vide. A l’une des extrémités de la plage de galets d’Hastings (Royaume-Uni), dans le Sussex, le hangar du sauvetage en mer (la Royal National Lifeboat Institution, RNLI) est fermé, son bateau n’est pas à quai. Il est 15 heures, il fait déjà sombre, l’air est glacé. Quelques heures plus tôt, mercredi 24 novembre, à une vingtaine de kilomètres plus à l’est, vingt-sept personnes (dont sept femmes et trois enfants), se sont noyées au large de Calais (Pas-de-Calais) en tentant de rejoindre les côtes du Kent. Ils visaient probablement Douvres ou la pointe de Dungeness, un peu plus proches des cotes françaises, comme la plupart des small boats partant de Dunkerque (Nord) ou de Calais.
« Le bateau du secours en mer d’Hastings était de sortie aujourd’hui, celui de Dungeness aussi, ils ont assisté deux embarcations mais ne les ont pas ramenées ici », précise Jane Grimshaw, de Hastings Supports Refugees. Cette costumière de cinéma reçoit, à deux pas de la plage, dans les bureaux de sa collègue Rachel Lowden, une thérapeute spécialiste de l’autisme, qui a cofondé l’association avec elle. La nouvelle du drame vient de tomber, les deux femmes partagent leur tristesse : « Cette route empruntée par d’énormes paquebots est si dangereuse, on a peur qu’il y ait eu bien plus de disparitions ces derniers mois que celles officiellement reportées [dix avant le drame de mercredi]. »
Depuis Londres, la ministre de l’intérieur Priti Patel pousse à l’adoption au Parlement d’une réforme de l’asile autorisant le Royaume-Uni à procéder à des pushbacks – le renvoi des embarcations par les gardes-côtes vers les eaux françaises –, pour tenter de « reprendre le contrôle » des frontières promis par le gouvernement brexiter de Boris Johnson. Mais dans le Kent, des communautés citoyennes refusent cet environnement hostile aux migrants et tentent, avec les moyens du bord (donations, appel au volontariat), d’aider les personnes arrivant désormais en grand nombre quotidiennement sur leurs plages.
Hastings Supports Refugees a été créée en 2015 « en réponse à ce qui se passait dans la jungle de Calais et à tous ces Syriens qui fuyaient la guerre », explique Jane Grimshaw. L’association organise des collectes de fonds et d’équipements, qu’elle fait parvenir en France. Mais l’été dernier, la crise migratoire a pris un tour bien plus tangible pour les deux femmes. Rachel Lowden raconte : « C’était le 21 août, j’étais sur une plage à l’est d’Hastings pour un barbecue avec ma fille, il devait être midi. Il y avait un hélicoptère dans le ciel. Sur la plage, quelqu’un avec des jumelles nous dit : “On dirait des migrants !” J’ai vu un bateau tout plat et des dizaines de gens dessus. Je me suis : que peut-on faire pour les accueillir ? »
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