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Brésil : inquiétante ruée vers l’or en Amazonie

Vue aérienne des embarcations d’orpailleurs illégaux sur le fleuve Madeira, le 23 novembre 2021. BRUNO KELLY / REUTERS

Vu du ciel, cela ressemble à une gigantesque armada. Par centaines, les embarcations de bois remontent le rio Madeira, alignées les unes aux autres dans une formation quasi militaire et occupant toute la largeur du cours d’eau. Les dragues, surmontées de maisonnettes colorées, bardées de générateurs, de câbles, de poulies et de longs tuyaux, avancent lentement sur la rivière aux tons boueux. Une flottille typique des garimpeiros, les orpailleurs d’Amazonie.

Ces images inquiétantes ont fait ces derniers jours le tour du Brésil. Trois cents à six cents embarcations, soit quelques deux mille orpailleurs selon les spécialistes, vogueraient actuellement sur le rio Madeira à la recherche d’or au cœur de la grande forêt. Leur date d’arrivée est incertaine ; selon des habitants, elle remonterait à une douzaine de jours. Cette concentration stupéfiante d’embarcations a rapidement été qualifiée de « quartier » ou de « condominium flottant ». Certains évoquent la folie d’un film digne de Mad Max et tous prédisent un cataclysme environnemental.

A l’origine, comme souvent en Amazonie, il y a une rumeur : celle d’un « filon » monumental de métal précieux, découvert à l’embouchure du rio Madeira. « Là-bas, ils se font un gramme d’or par heure ! », s’emballe un orpailleur, dans un enregistrement audio diffusé sur les réseaux sociaux de la région et obtenu par le quotidien O Estado de São Paulo. Vite, les barges sont chargées de vivres, d’essence et d’hommes. En route pour la ruée vers l’or.

Embarcations d’orpailleurs illégaux sur le fleuve Madeira, le 23 novembre 2021. BRUNO KELLY / REUTERS

L’activité est menée en plein jour. Elle est pourtant totalement illégale et hautement dévastatrice. Afin d’extraire le métal précieux, les orpailleurs plongent de longs tuyaux à 20 ou 30 mètres sous la surface, aspirant tout ce qui se trouve au fond du cours d’eau. Les boues ainsi puisées sont filtrées et épurées à l’aide de mercure afin d’isoler l’or des algues, de la terre et des cailloux. Les « déchets » sont rejetés dans la rivière, ainsi saccagée et polluée.

Des records

L’orpaillage est loin d’être une nouveauté sur le rio Madeira, cet immense cours d’eau de 3 300 kilomètres qui trouve sa source en Bolivie. L’activité est pratiquée à grande échelle dans cette partie du Brésil depuis les années 1980. « Mais la crise économique et l’explosion de la pauvreté, avec en parallèle la flambée du prix de l’or [+ 52 % le gramme en trois ans à la Bourse de New York] ont tôt fait de convaincre de nouveaux candidats à l’orpaillage de se lancer dans l’aventure », détaille François-Michel Le Tourneau, géographe au CNRS et spécialiste de l’orpaillage.

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