L’incident aurait pu passer inaperçu dans le flot de menaces et de mises en garde du moment entre Occidentaux et Russes au sujet de l’Ukraine. Mais il raconte les crispations suscitées par le conflit « gelé » dans l’est du pays, sur fond d’impasse diplomatique et de bruits de botte. Le ministère russe des affaires étrangères a publié sur son site, dans la nuit du mercredi 17 au jeudi 18 novembre, une partie de la correspondance entre son patron, Sergueï Lavrov, et ses homologues français et allemand, Jean-Yves Le Drian et Heiko Maas, à propos d’une éventuelle relance des négociations sur le Donbass. La révélation de courriers confidentiels rompt avec les usages habituels dans le monde feutré des diplomates.
« Nous avons pris note de la décision du ministre russe des affaires étrangères, M. Lavrov, de rendre publique notre correspondance, a réagi Anne-Claire Legendre, porte-parole du Quai d’Orsay. Nous considérons cette démarche comme contraire aux règles et usages diplomatiques ». Berlin a protesté sur le même ton.
Le principe d’une rencontre dite en « format Normandie » – adopté en 2014 entre l’Ukraine, la Russie, l’Allemagne et la France – avait été agréé par Emmanuel Macron, la chancelière allemande, Angela Merkel, et le président russe, Vladimir Poutine, lors d’un échange à distance, en octobre. Paris et Berlin avaient proposé d’organiser le rendez-vous à l’occasion du 11-Novembre, dans la capitale française, mais il ne s’est jamais tenu. Depuis, chacun se renvoie la responsabilité de cette occasion manquée. France et Allemagne estiment que la Russie posait des conditions « inacceptables », en voulant jouer les médiateurs alors qu’elle soutient les séparatistes prorusses à l’origine des combats dans le Donbass, ces derniers présentés par Moscou comme un « conflit interne » ukrainien. Quant à M. Lavrov, il a mis en cause les « mauvaises manières » franco-allemandes dans cette affaire, affirmant avoir été disponible pour croiser ses homologues à la date prévue.
« Nous n’avons rien à cacher »
La publication de ses échanges avec MM. Le Drian et Maas entre, elle aussi, dans la catégorie des « mauvaises manières ». « Le procédé est curieux, mais assez dans la pratique du ministère des affaires étrangères russe, très agressif à l’égard des Européens », dit un diplomate. « On peut le dire : nous en avons marre », a, pour sa part, lancé M. Lavrov vendredi, dans une sorte d’autojustification implicite. D’après lui, MM. Le Drian et Maas « ont fait des déclarations arrogantes, pas tout à fait correctes et pas très éthiques : “Tous sont prêts, Poutine a donné son aval, mais Lavrov ne veut pas” », a-t-il ironisé lors d’une conférence de presse.
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